29/01/2008
Feuilles mortes…
La colline où nous habitons culmine à 350 mètres.
C’est une colline à l’écart de la petite ville, toute de garrigue à l’origine, que les maisons ont progressivement colonisée, depuis un bon quart de siècle maintenant.
La terre est de roc, la végétation naturelle constituée de chênes, chênes verts pour la plupart, cistes et genêts, le sol couvert de touffes de thym sauvages, bataillant au milieu de gros cailloux. Quelques pins s’y exhibent aussi, dont on sent bien qu’ils n’en sont pas les habitants naturels, car on croise beaucoup d’entre eux malades ou réduits à l’état de squelettes desséchés, par manque d’eau ou par négligence, quand personne n’est passé pour les abattre après une de ces catastrophes naturelles propres à notre microclimat.
Et puis au milieu de cet amalgame, dans un désordre sans règle ni logique, quelques silhouettes majestueuses s’imposent. Ce sont des Chênes blancs, gigantesques, qui rappellent un peu l’arborescence des chênes du Nord, excepté la nature de leur feuillage.
Notre jardin n’est pas un terrain apprêté, les jardiniers qui s’y sont succédé, nous compris, finissent par renoncer à domestiquer ce lopin coriace, où quelques poussières de terre dissimulent mal la densité du roc. L’outil le plus précieux ici est la barre à mine, puis viennent la serpette pour les lavandes, le sécateur et ses dérivés pour les tailles. En emménageant il y a dix ans, GéO a investi dans les camions qui livrent de la « bonne terre » et a répandu plusieurs mètres cubes de terre arable en vain. La terre s’est dissoute progressivement dans l’entrelacs de rochers plus ou moins gros, et la nature a repris ses droits. À mon tour, je me suis lancé quelques défis, des centaines de litres de terre de bruyère et quelques essais malencontreux plus tard… Je me contente d’observer les Iris en mai (eux poussent tout seul dans le calcaire), les lauriers roses tout l’été, les haies de Pyracanthas réchauffant le paysage d’hiver. Il fait trop froid pour les Mimosas qui ensoleillent la côte dès Janvier, trop sec pour les arbustes et les fleurs qui s’épanouissent un peu partout en France.
Le charme de notre jardin, c’est son sous-bois… Les chênes verts sont restés en place à la construction de la maison et occupent l’essentiel du terrain. Ils procurent une ombre agréable, leurs troncs frêles se divisent en petits groupes, mais dessous, rien ne pousse. À longueur d’année, les petites feuilles sèches, restées vertes, et les glands minuscules tombent sur le sol glabre ; il faut régulièrement ratisser pour contrer ces promesses de pousses à venir. Fastidieux mais simple.
Sur ce terrain, nous avons aussi deux splendides Chênes blancs. L’un domine le sous-bois central, l’autre appartient au voisin et déborde largement sur notre allée. C’est celui-ci qui est cause de mon souci.
En s’étalant au-dessus de la haie, ce feuillu ne procure guère d’ombre, dans un passage où nous ne la recherchons pas. Mais il existe à ses pieds une petite plate-bande que GéO a protégée d’un grillage, évitant aux chats et aux chiens d’arroser les touffes de thym et autres timides asters qui se plaisent bien, accotés au mur mitoyen. C’est le point où tout se complique.
Car le chêne blanc, pour imposant qu’il soit, est un despote, qui perd son feuillage de Novembre à Avril. Et des feuilles, il en produit plus qu’il n’est décent. Il faut avoir vécu ailleurs puis ici pour comprendre que la tâche relève du mythe de Sisyphe. Chaque coup de vent, chaque pointe de gel provoque une chute partielle qui jonche l’allée et s’insinue sous le roncier de la plate-bande. Trois ou quatre grosses poubelles sont alors nécessaires pour retrouver un peu d’ordre… Jusqu’au petit coup de mistral suivant. Cette année, une exceptionnelle série de jours pluvieux a rompu les lancinantes périodes de vent d’ouest, et notre chêne s’est très vite défeuillé, pour mon contentement. J’allais
entrevoir la fin de la corvée. Que nenni ! Jugez plutôt sur pièce et regardez cette branche basse qui me nargue.
En dépit des fureurs du Mistral et des pluies abondantes, les feuilles rousses et sèches, survivantes des gels matinaux vont continuer à s’accrocher ainsi jusqu’aux bourgeons d’Avril, où enfin elles cèderont la place aux pousses suivantes. Il me reviendra alors d’épouiller une nouvelle fois les thyms en fleurs, les lavandes et tous les épineux qui offrent un abri à la feuillée récalcitrante.
01:30 Publié dans goutte à goutte | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Nature, Provence, jardin, feuilles mortes, plaisir et corvées | | del.icio.us | Facebook | | Imprimer
28/01/2008
festival céleste
Pour faire pendant à l'album coucher de soleil en mer, voici quelques vues volées au spectacle qui nous a été offert hier soir.
Je sais à quel point il est rare de s'en régaler quand on habite en ville ou près des éclairages urbains, les halos des cités éteignent jusqu'au reflet de la lune… Ici, quand il m'arrive ( rarement) de me lever les nuits de pleine lune, la luminosité est telle que je cherche automatiquement l'interrupteur: " zut, j'ai encore oublié le spot du jardin!"
Pour les âmes sensibles, l'auteure tient à préciser qu'il ne s'agit pas d'un incendie.
14:35 Publié dans goutte à goutte | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : photos, spectacle naturel, coucher de soleil, lumière, couleurs, élan vital | | del.icio.us | Facebook | | Imprimer
22/01/2008
grands Moments (2)
À quatre heures, cette nuit-là, le vent est tombé brutalement.
Dans son sommeil, GéO a perçu l’accalmie et il s’est levé doucement pour en vérifier l’effet.
Dans l’obscurité ponctuée des lumières du port, il a noté l’abattement des pavillons en haut des mâts, il s’est imprégné de ce calme soudain.
Regagnant sa couchette, il s’est lové contre moi pour chuchoter doucement :
- Dors encore, repose-toi bien, nous partons tout à l’heure…
Mais quand GéO prend une décision, elle est applicable sans délai…
À six heures, nous sommes sous les douches à la Capitainerie, Alain tient à acheter des croissants pour achever en beauté le séjour à Calvi. Il nous faut aussi du pain pour préparer les sandwiches, car un brin de réalisme me souffle qu’il vaut mieux ne pas compter accéder à la cuisine une fois sortis du port…
Mes prévisions se sont vite révélées en dessous de ce qui nous attend.
Depuis cinq jours, nous sommes bloqués à Calvi, incapables d’affronter les vagues énormes levées par ce vent continu de force 7 à 8, venu du continent. Sous un ciel nettoyé, la luminosité est vive et depuis les hauteurs des remparts de la citadelle, le paysage marin est magnifique, l’azur du ciel et le bleu marine intense de la mer semblent rehaussés par les crêtes blanches des moutons, animés d’un scintillement perpétuel. Sous le soleil ardent qu’aucun nuage n’altère, la lumière crue fait étinceler les reliefs formés par la houle. En hauteur, la violence du vent est telle qu’un enfant peut être bousculé sur les chemins escarpés ; en contrebas sur la mer, même les gros navires qui assurent les liaisons avec le continent sont ballottés entre les creux presque aussi profonds que la taille de leur coque…
Le cabotage prévu le long de la côte s’est converti en explorations terrestres, dont le phénoménal petit train, Micheline héritée d’un autre temps, transport vétuste mais idéal pour pénétrer encore en Haute-Corse dans des conditions pittoresques et inattendues.
Autre conséquence du vent, depuis deux jours, nous sommes les témoins privilégiés du gigantesque incendie qui ravage les coteaux à l’est de la baie.
Mais nos invités doivent rentrer et nous sommes à l’affût de l’amélioration, consultant dix fois par jour la météo sur tous les supports à notre disposition. La propagation du feu jusqu’à l’aéroport brise net l’espoir de Marie qui compte prendre l’air, reste l’accalmie promise… GéO n’est pas le plus virulent pour tenter la chance, le Leyla n’ayant encore jamais affronté une mer aussi agitée. Mais la tombée du vent est prévue, annoncée depuis la veille, il suffit de la constater … Et faire confiance !
Au poste de carburants, nous ne sommes manifestement pas les seuls à espérer reprendre le voyage. C’est un peu l’affolement aux manœuvres, et on sent bien chacun préoccupé, tendu, les nerfs à vif, prêt à la querelle. Il faut dire qu’à l’intérieur du port, malgré les longues digues, le clapot est encore actif, ce qui rend les manœuvres moins précises.
Dès l’extrémité de la jetée franchie, l'amplitude de la houle s’accentue. Le Leyla pointe du nez dans les creux, se cabre un peu sur les crêtes. Mais par temps d’orage soudain, comme la Méditerranée y est sujette, nous savons qu’il est stable et qu’il faut apprendre à longer la crête de la vague qui nous porte un court moment, puis manœuvrer au bon endroit pour aborder la descente de trois quarts et accompagner le mouvement en biais, jusqu’en bas. Pour le moment, ça bouge, il faut rester souple, mais je propose encore un café, histoire de chasser cette odeur tenace de gas-oil que nous venons de prendre à pleins poumons. Marie et Alain déclinent l’offre, seuls GéO et moi sommes volontaires.
Lassée d’être bousculée sans arrêt sous l’effet des rouleaux, Marie s’est réfugiée sur la banquette qui court derrière le siège du poste de pilotage et se dit rassurée, car elle peut ainsi contempler le paysage en marche arrière et dire un adieu à la citadelle qui s’éloigne lentement, admirer les hautes falaises qui ont si bien défendu ce pays abrupt et sauvage. Alain s’est installé sur le siège à gauche, et je me suis calée à côté de notre pilote, prête à le seconder. En effet, en raison de l’ampleur de cette houle, il est impossible de suivre la route en conservant le cap. Tant que le Leyla longe la côte sur notre gauche, nous n’avons pas de réel problème, la représentation de notre direction est facile. Mais à mesure que nous avançons vers le large, les vagues se creusent rapidement et malgré l’abattement du vent, une petite brise fraîche perdure et nous rafraîchit, tandis que la grosse mer provoquée par les rafales des jours précédents persiste. Nous ne sommes pas encore en vue du phare de la Revellata que l’intensité des mouvements nous contraints à rester agrippés à nos places. Heureusement que je peux m’accrocher des deux mains à la poignée de fixation en face de moi, car à chaque descente un peu vertigineuse je décolle de presque soixante-dix centimètres, avant d’être à nouveau plaquée sur le siège par l’énorme douche qui nous arrive de l’avant gauche où nous venons de taper. Heureusement qu’en préparant le café, j’ai remonté nos coupe-vent. Nous avons vite compris la nécessité de s’encapuchonner. À la troisième douche, Alain, dégoûté, abandonne son siège, car nos lunettes ruissellent tellement qu’elles deviennent inutiles et malgré les élastiques qui les maintiennent, nous avons peur de les perdre.
Nous ne sommes cependant qu’au début du voyage. À la mine renfrognée de GéO, je suis certaine qu’il jauge nos possibilités et mesure nos chances. Il est le Capitaine, c’est à lui de décider, pour ma part, je n’ai aucune inquiétude, je lui fais aveuglément confiance.
Plus nous avançons, plus l’agitation de la mer augmente. Le Leyla avance bravement, à vitesse modérée en fonction des vagues, cinq à six nœuds en ce début de course et GéO me demande si je pense avoir prévu assez de provisions faciles à grignoter car à ce stade, les côtes du continent paraissent vraiment très loin ! Toujours agrippée à ma poignée, ma tâche essentielle consiste à crier au barreur la rectification nécessaire pour maintenir notre cap dans la bonne direction…
- 5 ° à gauche… 10 à droite… 12 à gauche…
Nous prenons les trombes d’eau par trois-quarts avant, sur le bâbord, c’est-à-dire à gauche. Notre route est au 295, au Nord- Est. Heureusement, nous sommes équipés d’un GPS branché sur la batterie par une prise d’allume-cigare et nos écarts sont instantanément traduits sur le petit appareil. Il me suffit de lire, dès que je peux ouvrir les yeux douchés par les paquets de mer qui nous inondent régulièrement.
Invariablement, notre monture se cabre pour monter à l’assaut de la masse d’eau qui fonce vers nous, et semble un instant nous dominer de sa crête écumante, nous pressentons alors que nous sommes au sommet et avant que s’engage la descente sur le toboggan liquide, GéO se concentre pour comprendre le mouvement et axer le bateau sur la pente la plus douce, en maintenant notre axe sur ce chemin éphémère… À chaque fois que nous touchons le fond, c’est un énorme claquement de la coque qui s’affale au fond, un bruit à la fois sec et mat, un craquement qui pourrait évoquer une brisure… Une fois, une seule, je me tourne vers GéO pour lui glisser :
- Tu penses qu’il va tenir ?
- Qui ? Le bateau ? Tu l’as bien vu, il résiste mieux que nous… Regarde Alain…
Effectivement, en restant agrippée du mieux possible, je me tords pour jeter un coup d’œil sur nos passagers. À l’abri relatif de notre dossier, ils se sont pelotonnés l’un contre l’autre, Marie se tient à la rambarde de la passe –avant et Alain s’est recroquevillé tout contre elle. Pour autant que je puisse m’en rendre compte, ils se sont mis en « stand-by », paupières closes, muets dans ce tumulte, ils sont figés dans l’attente du moment où les choses se calmeront. Que pourraient-ils faire de plus ?
Zoom arrière comme si nous pouvions nous voir avec l’optique de Googleearth, je nous imagine comme une minuscule puce blanche au milieu du vaste plan ondoyant qu’est la Méditerranée… Quelque part entre le doigt de la Corse et la côte varoise, une embarcation de presque dix mètres sur trois mètres quarante, tel un confetti flottant isolé.
Cependant nous voguons et poursuivons notre route, grimpant et glissant toujours vaillamment à l’assaut des vagues, l’une après l’autre, la douche d’écume puis la correction de trajectoire :
- 15° à gauche…
GéO rectifie, et nous repartons à l’attaque de la lame suivante…
Sauf qu’à ce moment-là, tout à coup, GéO me lance d’une voix alarmée :
- Qui a fermé les hublots ?
- Ben, Marie et moi, on a fait le tour…
- Ah oui, ben tu as gagné, on embarque…
Je suis son regard vers le pont avant.
Horreur ! La vitre de plexiglas du panneau de pont se soulève dans notre plongée et le paquet d’eau qui arrive dessus la rabat, mais…
Simultanément, je jette un coup d’œil dans la descente d’escalier vers le carré et je vois la gerbe qui éclabousse le sol. En une fraction de seconde, j’ai compris, pas moyen de faire autrement ! Il faut que j’intervienne et que je descende dans ce qui constitue normalement notre abri. C’est devenu un champ de bataille où s’entrechoquent les cannes à pêche dévissées de leur support et qui se livrent au gré de nos opérations à un ballet désordonné.
Devant la porte, j’ai quand même un moment d’hésitation, je visualise les chocs qui ne vont pas manquer de se produire, impossible de demander l’arrêt momentané de l’agitation ! Je sens le regard de GéO dans mon dos, mais il ne me presse pas davantage, il sait que j’ai compris et que je vais y aller.
Et comme on s’apprête à plonger, je prends mon souffle, me tient farouchement aux deux barres latérales en haut de ce fichu escalier de meunier, et je jette mes pieds en avant, dans le vide ou sur le sol arrivé brusquement à ma rencontre, d’une fraction de seconde à l’autre tout roule et change. En un bond, je suis en bas, et là, la perception de l’espace se complique encore. En haut, nous bougeons d’avant en arrière avec un décalage vers la gauche, à cause du sens de la houle. En bas, c’est bien moins régulier, il me semble être posé sur une toupie qui n’a plus d’orientation du tout. Comme un ballon qui roule, je suis propulsée à gauche contre la cuisine, à droite sur la table, une canne à pêche se coince dans mes cheveux tandis que je suis obligée d’en enjamber une seconde… Néanmoins, cramponnée comme je le peux, je progresse vers la maudite trappe qui s’est entrouverte et prenant mon élan, j’agrippe farouchement les taquets noirs qui ont failli … Attraper le panneau avant qu’il ne se lève à nouveau, bloquer fermement les broches de plastique noir dans leur logement, en priant qu’ils ne cèdent plus sous les vibrations du Leyla. Justement, un nouveau plongeon me précipite contre la porte de la cabine, je pense m’y encastrer, mais non, juste un gros gnon sur le front, et je me retourne pour entamer la traversée de la pièce dans l’autre sens, quand… Je réalise qu’un autre hublot, celui qui se situe au-dessus de l’équipet gauche est lui aussi ouvert… Malgré une onde de chaleur qui commence à vriller mon estomac, il faut que je fasse le tour de toutes les ouvertures du bateau : deux hublots dans la cabine avant, dont un accessible en rampant sur la couchette ; deux encore dans le carré, même manœuvre à droite, passage obligé en rampant sur les banquettes en U autour de la table ; ceux de la cabine arrière,et même celui du coin toilettes, habituellement toujours ouvert, protégé en principe par le pare-brise du poste de pilotage. Malgré le vacarme ininterrompu, j’entends la voix de GéO qui s’impatiente :
- Alors, qu’est-ce que tu fais, tu y’arrives ?
- J’arrive !
Oui, j’arrive, encore faut-il grimper à nouveau ces demi-marches qui offrent bien peu de soutien en pareilles circonstances !
Depuis près de deux heures que nous bataillons maintenant, il nous semble que la mer se calme peu à peu. D’abord incrédule, mais las, GéO me demande confirmation de cette impression. Attentifs, nous enregistrons que les corrections de cap s’amenuisent, les creux sont moins abrupts. Effectivement, nous avons franchi le plus dur. Soulagé, mon capitaine endosse d’un coup sa fatigue. Barrer dans de telles conditions reste un exercice exceptionnel et la responsabilité qu’il a assumée ouvre l'appétit.
- Tu n’aurais pas quelque chose à grignoter ?
Encore une descente au carré, mais cette fois, j’ai le temps de ranger les fameuses cannes à pêche, et cela fait, de me rendre compte que les dégâts sont minimes. En dehors de la flaque d’eau au milieu de la pièce, le reste est en ordre, notre panier à sandwiches coincé sous la table. Je nous remonte de quoi reprendre des forces, et GéO en profite pour me passer la barre, se détendre enfin.
Derrière nous Alain et Marie dorment comme des braves, inutile de les déranger.
C’est donc à mon tour de m’entraîner à apprivoiser les moutons, mais effectivement les creux sont maintenant réduits à moins d’un mètre. C’est largement suffisant pour mon expérience personnelle et d’ailleurs, de demi-heure en demi-heure, l’état de la mer s’améliore.
À onze heures, GéO dresse un premier point : nous avons parcouru 19 milles, soit près de 35 kilomètres, bien peu en regard des deux cents qu’il nous faut franchir jusqu’au bercail…
J’accélère donc le régime des moteurs, et progressivement dans l’heure suivante, nous regagnons un peu plus de vitesse. Vers treize heures, j’ai faim à nouveau et nous nous offrons un second pique-nique, cette fois sur une onde quasiment plate… Insensiblement en effet, nous sommes passés d’une mer forte à une étendue atone, en descendant graduellement toute l’échelle de la météo marine…
Une nouvelle rencontre avec les dauphins nous donne l’occasion de tirer nos acolytes de leur sommeil. Endoloris par la position inconfortable où les a saisis le charme de la belle au bois dormant, ils s’émerveillent longuement du calme revenu. Peu après nous sommes survolés par un petit bimoteur, dont les pilotes se sont étonnés sans doute de trouver une embarcation sur le secteur, puis nous avons croisé l’énorme Napoléon Bonaparte de la SNCM. Alain pousse les moteurs à trois mille tours/minute, ce qu’ils supportent aisément et nous rattrapons progressivement notre retard. Notre entrée au port se produit au tintement du clocher de Sainte Maxime, sept heures sonnantes, nous poussons un immense Hourra !