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Le Club des Incorrigibles Optimistes

Le Club des Incorrigibles Optimistes

Auteur : Jean Michel Guenassia

Éditeur : Albin Michel

Année : 2009


« Je préfère vivre en optimiste et me tromper, que vivre en pessimiste et avoir toujours raison »( Anonyme)

Cet exergue en guise de préliminaire pourrait suffire à résumer la » substantifique moelle » de ce roman. Mais ce serait vous priver de moments délicieux passés en tête à tête avec le narrateur et la riche compagnie dont il s’entoure… Mieux vaut prendre le temps de lire ces pages en les dégustant comme il convient.
Il s’agit là encore d’un premier roman édité par un auteur de 59 ans ! En réalité Jean Michel Guenassia n’est pas un débutant en écriture, puisqu’il a signé au cours de sa carrière quelques scénarii pour la télévision ainsi que des pièces de théâtre, sans compter un roman policier publié en 1986. En cela, son écriture est celle d’un écrivain confirmé, au style direct, au poids des mots justement pesé; au fil des sept cent cinquante pages l’ensemble coule avec beaucoup d’aisance, le roman se quitte à regret.

Le récit s’organise comme la chronique de la vie d’un jeune garçon, d’Octobre 1959 à Juillet 1964. Michel Marini, le narrateur, revient sur les années décisives de son adolescence, après les retrouvailles tardives d’un ami perdu de vue. Cette rencontre ravive le souvenir d’une période capitale dans la formation du narrateur, quatre années riches d’événements historiques et familiaux…
Michel habite avec sa famille le quartier latin et suit les cours du fameux lycée Henri IV. Sa mère intransigeante « porte la culotte », son père, plus souple, arrondit parfois les angles, et Michel souffre d’une éducation où les préoccupations professionnelles de ses parents sont accentuées par la rigueur ambiante. Il affiche sa rébellion précoce en escapades buissonnières qui le mène de son lycée, H IV, jusqu’à ce bistrot de la place Denfert- Rochereau, le Balto, où il rencontre les membres de ce mystérieux Club aux règles tacites et incontournables. Cependant, la vie du jeune Michel n’est pas seulement consacrée au baby-foot et aux échecs, ainsi qu’aux efforts pour éviter le surveillant général de son sélect lycée; comme tout jeune homme, d’autres émotions le guettent : histoires de famille compliquée,concernée directement par la tournure des événements en Algérie . Michel a un grand frère, Franck, qu’il admire infiniment, comme tout cadet qui se respecte. Pourtant, le parcours de cet aîné et la fréquentation de ses amis Pierre et Cécile constituent également pour le narrateur une ouverture sur le monde en même temps que la confrontation aux circonstances historiques qui bouleversent la France en cette période particulière. L’adolescent explore les multiples facettes de l’amitié, expérimente à la fois la solidarité et la complicité compassionnelles, la trahison et les meurtrissures de l’amour, autant d’initiations grandeur nature qui forgent son passage à la maturité.

Voilà les éléments qui nourrissent ce récit vif et coloré, sensible et dense. Si Jean Michel Guenassia saisit le point de vue d’un adolescent, il démontre habilement comment la fréquentation des membres du Club des Incorrigibles Optimistes constitue un contrepoint déterminant dans son initiation à la complexité du monde. Il parvient à embrasser sans fausse naïveté les arcanes de ce groupe d’hommes lestés d’expériences amères, qui tentent de transmettre leur Optimisme, comme un ultime sursaut contre l’adversité…. De ce fait, le déracinement des membres du Club est traduit avec véracité aux limites du cynisme et d’une autodérision qui rafraîchit le récit et nous attache à ces personnages originaux.
En filigrane de ce récit personnel, Jean Michel Guenassia dresse un tableau percutant de la période, de la fascination pour le rock’n roll aux sursauts engagés des intellectuels, des drames de la décolonisation aux fractures politiques du bloc de l’Est, tout est humainement rapporté par le regard généreux d’un écrivain qui était alors à peine plus jeune que son personnage.
Je vous invite donc à la lecture de cet ouvrage dense qui se lit avec passion.
Jean Michel Guenassia a obtenu le Goncourt des Lycéens en 2009

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