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L'Armée Furieuse

L'Armée Furieuse

Auteur : Fred Vargas

Éditeur : Viviane Hamy

Année : 2011- Mai

Voilà la version 2011 des aventures d’Adamsberg. Au fil du temps et d’une large dizaine de romans policiers (ou rompol comme on dit maintenant), nous nous sommes attaché au "Pelleteur de nuages", policier asocial incapable de mémoriser les noms de ses collaborateurs, à son caractère brouillon mais intuitif, plus habile à résoudre les énigmes en déroulant ses inspirations oniriques qu’en appliquant rigueur et méthodologie. Et puis, en plus d’Adamsberg, Jean-Baptiste pour les intimes, nous retrouvons avec un plaisir non dissimulé les personnalités qui l’entourent : l’hypersensible Danglard, Zerk le fils adopté depuis "Un lieu incertain", l’invincible Retancourt et l’autre poète du cru, Veyrenc, jadis rival , aujourd’hui apaisé par de dures épreuves partagées. Bref, nous entrons chez Fred Vargas munis une besace chargée de souvenirs et d’émotions. Ce n’est pas Vargas qui nous offre un nouveau polar, ce sont les lecteurs qui reviennent d’une longue absence et reprennent le fil d’une relation attentive avec des personnages connus. Car c’est un fait avéré dans les toutes les suites actuelles, interaction du phénomène des séries, les personnages récurrents évoluent et provoquent ainsi une addiction.

À ces retrouvailles, Fred Vargas sait concocter un nouvel écrin à sa façon. L’énigme est solidement ancrée dans un univers baroque et sulfureux. L’auteure adore flirter avec une pointe d’irrationnel qu’elle extrait de savantes compilations ésotériques : la résurgence de la peste (Pars vite et reviens tard), la fréquentation des vampires (Un lieu incertain), la piste des loups garous ( L’homme à l’envers)… Ces peurs anciennes ligotent l’intelligence du populaire et enracinent le Mal au cœur des milieux ordinaires, parmi les gens simples que le poids des traditions et l’hérédité culturelle aliènent. Alors, Fred Vargas a beau jeu de dresser de cocasses portraits des états de l’Humain, crédules ou filous, manipulateurs ou naïfs, tribus archaïques ou corps professionnels solidaires. On sent bien que l’écrivaine s’amuse et se délecte à lancer sur les chemins (dans nos pages fébrilement dévorées) toute une palette d’humanité en descendance directe des nouvelles de Maupassant, à peine écornés par les observations de Bouvard et Pécuchet.

Car c’est à nouveau en Normandie profonde que Fred Vargas implante l’intrigue de" l’Armée Furieuse." Terroir déjà parcouru par nos héros (cf. Les Bois éternels) dans lequel Adamsberg évolue avec aisance, lui dont l’esprit brumeux s’adapte sans frisson au brouillard des superstitions.

Mais quelle est donc l’intrigue ? Je vous entends vous impatienter…
Une matriarche fragile et dépassée requiert l’aide de notre rêveur pour protéger sa tribu bien sûr, et délivrer sa fille Lina du poids d’un savoir trop lourd… Une vieille légende pourfendue mais tenace empoisonne l’atmosphère d’une petite ville normande par ses morts annoncées. Un descendant de l’armée napoléonienne incarne l’esprit et la rigueur militaires des gendarmes, tandis qu’un vieux comte amoureux et son fils adoptif entrent en conflit… Mais les prémonitions de la pulpeuse Lina sont avérées et l’accueillante Léo est retrouvée inanimée… C’est assez pour qu’Adamsberg s’offre un séjour insolite en campagne et démêle à sa façon sinueuse les fils d’une affaire aussi loufoque que compliquée.
Eh non, je n’en dirai pas plus. C’est la règle du jeu n’est-ce pas, en matière de Rompol…
Ne doutez pas des surprises et des rebondissements semés par Fred Vargas. Comme toujours, aucune déduction n’est acquise, aucun élément n’est certain, tout est fluctuant, évanescent, ambivalent jusqu’aux dernières lignes… De quoi égayer et réchauffez les froides soirées automnales qui nous attendent.

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