Millénium 3- La reine dans le palais des courants d'air
Auteur : Stieg Larsson
Éditeur : Actes Sud actes noirs
Année : 2007
Alors que le premier volume reposait sur une intrigue indépendante, ce troisième tome se présente comme une suite du deuxième roman. Cette construction en forme de feuilleton dispense de revenir sur la présentation des personnages, et permet d’entrer directement dans le vif du sujet.
Dernier volet de la trilogie officielle Millénium "La reine dans le palais des courants d’air" nous permet de retrouver Lisbeth Salander dans un moment critique. Pour mémoire, à la fin de "la fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette", nous laissions l’héroïne Lisbeth Salander en grand danger de mort, une balle dans la tête, ressuscitée et extirpée de la tombe que son frère, Ronald Niederman, et son père, Zalachenko, lui avaient préparée dans les bois autour de la ferme isolée où cette fille tenace avait réussi à les retrouver.
"La reine dans le palais des courants d’air" s’ouvre au moment où Lisbeth est opérée et sauvée par Anders Jonasson, le médecin urgentiste de l’hôpital Sahlgrenska à Göteborg. Sauver la vie de quelqu’un implique un lien, même quand c’est dans le cadre de son métier. Jonas devient donc un personnage qui conquiert son importance, d’autant que l’hôpital devient la résidence obligée de Lisbeth, pendant une bonne partie du récit.
Mais si Lisbeth parait un long moment hors d’elle-même, les événements vont continuer à se focaliser sur sa survie jusqu’à la reprise progressive de ses facultés d’investigations; le lecteur assidu sait depuis le premier volume que Lisbeth possède des dons bien particuliers. La reine est à terre, elle va se relever.
Comment? Il serait dommage d’en développer les péripéties ici, d'autant que le fil du roman n’est évidemment pas très simple.
Selon la construction spécifique que Stieg Larsson a établie dès le premier volume, les péripéties du récit se déroulent selon des séquences chronologiques précises, au cours desquelles l’intrigue avance simultanément pour tous les protagonistes. Ce procédé maintient parfaitement le suspense, à l’égal d’un film où, d’un plan à l’autre, le spectateur entrevoit par la séquence des images les enchaînements des éléments de l'histoire.
D’un côté, il faut compter sur les efforts de Mickaël Blomkvist, qui s’est adjoint les compétences de la rédaction de "Millénium", pour remuer ciel et terre afin de démontrer l’innocence de Lisbeth. D’autre part, les membres de la police de Stockholm, sous les ordres du commissaire Bublanski, doutent de plus en plus sérieusement des conclusions établies lors de l’enquête menée sous la juridiction du procureur Richard Ekström.
Parallèlement, les comparses de Zalachenko poursuivent leurs activités, plus ou moins couverts par la section spéciale de la Sapö, à l’origine de l’impunité de l’ex-espion soviétique. Politique et affairisme se combinent pour refermer un piège sournois sur l’héroïne du récit.
À côté de ces personnages déjà connus dans le roman précédent, Stieg Larsson introduit un certain nombre de personnages originaux, parmi lesquels figurent le commissaire Torsten Edklinth et son auxiliaire Rosa Figuerola. Ne manquent pas de répondre présents Armanjski et Holger Palmgren, bienfaiteurs historiques de Lisbeth. Le petit monde de" Millénium" connaît aussi moult perturbations, ce qui permet de passer implicitement de la tension du déroulement de l’intrigue principale aux diverses pressions que chaque personnage rencontre dans sa vie personnelle. Le résultat donne de la consistance à la vie autonome des personnages, il participe à la création d’un univers "Millénium" qui tient sa cohésion sur la durée des trois volumes. Ceci explique la séduction que la saga opère sur les lecteurs, vite « accros » au style et aux personnages eux-mêmes. Je me suis amusée à relever les remarques de fans qui entreprennent leur lecture comme on prend des nouvelles de parents ou d’amis que l’on sait soucieux. Curieux mélange de curiosité et de compassion, qui nous tient en haleine. L’analogie avec la construction des séries télévisées paraît assez évidente en effet.
Si vous arrivez jusqu’à cette page sans avoir encore entrepris votre propre plongée dans le monde de Millénium, ce dont je doute malgré tout, vous aurez compris que le divertissement phare de la période hivernale pourrait bien vous être offert sur ce plateau. N’ayez pas peur de l’apparence volumineuse des trois tomes. Cette littérature s’avale bien mieux que les gélules vitaminées vendues en pharmacie. Elle me paraît efficace à souhait pour rompre avec la monotonie des jours sans soleil. Seule mise en garde indispensable : attention à l’addiction!
Malheureusement, la disparition prématurée de Stieg Larsson nous prive de ce danger.
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