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04/11/2008

Trois petits tours et s'en reviennent…

Cette semaine parisienne est passée si vite, si riche de bons moments et de tendresse…

J’ai devancé GéO de quelques jours pour cocooner un peu, retrouver ma nichée en célibataire. Ce voyage s’est révélé instructif à plus d’un égard, je vous prépare une décoction à ma façon.
Entre ma Douce et mon Aurel, nous nous sommes offert quelques doux moments, régalades de fous rires à garder en mémoire. L’avantage de voir grandir ses enfants, c’est qu’à un certain niveau de relation, ils vous considèrent facilement comme la tête de turc, et vous devenez la cible favorite de leurs taquineries. Ce qui, à tout prendre, montre qu’on existe bel et bien et qu’on tient une place singulière dans leur environnement. L’inconvénient d’habiter loin d’eux entraîne une certaine nostalgie qui se compense par la densité des échanges quand nous nous retrouvons. J’aime ces confidences croisées au matin, autour de la séance de manucure, ou l’hilarité d’Aurélien tentant vainement de m’apprendre à piloter, à l’aide d’un stick, un bolide bondissant dans les rues virtuelles d’un circuit. Heureusement qu’à l’écran, la voiture est incassable, il y avait de quoi mobiliser tous les services d’urgence des hôpitaux londoniens !

Autre Grand Moment, la journée passée en compagnie de John et Jean-Claude.
Nous avions programmé le grand palais et L’exposition Picasso et ses maîtres. Naturellement, quinze jours à l’avance, il n’y avait plus moyen d’obtenir les billets coupe fil et nous nous sommes retrouvés le long du serpentin de queue. Mazette ! La chance veut que nous ayons toujours quelques sujets de conversation pour occulter les trois heures d’attente nécessaires pour accéder enfin au guichet d’entrée. Dans la file, les esprits s’échauffaient tout de même et des applaudissements « bon enfant » marquant la fin des deux heures consenties au départ, le ton est monté nettement au cours du dernier tiers, soit une heure pour parcourir dix mètres environ. Eh oui, quand vous êtes si près du but, la marche d’accès au perron du bâtiment si proche semble narguer ceux qui patientent… de moins en moins. Une brave dame dernière nous s’est mis à crier de plus en plus fort, réclamant « plus de démocratie dans l’accès à la culture », s’offusquant sans doute que quelques privilégiés entrés avant nous demeurent si longtemps en extase devant les toiles des Maîtres, bloquant l’accès aux visiteurs suivants…
L’exposition enfin offerte à nos yeux, nous nous sommes égaillés dans les salles combles. Le concept consiste à mettre en parallèle les toiles qui ont stimulé et inspiré le travail de Picasso, de son enfance à son grand âge, et l’on conçoit bien ce travail incessamment mis et remis en place, alors même que l’artiste cherche une voie d’expression différente, la technique et l’inspiration réalisent un aller-retour permanent. Picasso ne renie jamais ses prédécesseurs, il cherche une autre forme. Le fond constitué est richissime, de Zurbaran au Greco (son saint Martin) , Goya évidemment, mais aussi, à ma surprise, deux petits Cranach, Manet, Nicolas Poussin, Ingres, Cézanne, vous pourriez me reprocher de ne pas tous les citer, Delacroix et son célébrissime autoportrait, où l’on mesure le cheminement de Picasso sur deux de ses autoportraits 1901 et 1906, l’approche est intéressante. Bref, égoïstement, nous avons consacré deux larges heures du précieux temps de ceux qui faisaient la queue à contempler toutes les œuvres présentées, à en déguster avec délectation la substantifique moelle, à en boire l’intrinsèque essence jusqu’à plus soif… Mais nous avions tout de même faim… Mes amis m’ont alors invitée à satisfaire cette faim charnelle grâce aux bienfaits de l’omelette aux cèpes, concoctée amicalement par le patron du Sancerre en plein après-midi… Il n’y a décidément qu’à Paris que de telles omelettes se préparent : nos assiettes étaient recouvertes d’un dôme de cèpes de Bordeaux, à l’arôme et la saveur inégalée, à croire qu’il les avait cueillis à l’instant, dans le sous-bois du champ de Mars !

Bref, vous pouvez en juger, de Superbes Grands Moments.

Mais il m’a bien fallu interrompre ce douillet séjour chez ma Douce, et retrouver mon GéO, si généreux de m’avoir prêtée ainsi à mes enfants. J’avais oublié ce que l’expression temps-de-Toussaint veut dire… Rude rappel aux considérations d’un temps révolu… Ce mercredi-là, la température du ciel seine et marnais a refusé de monter plus haut que 3°. Malgré les indispensables allées et venues dans les locaux de Chanteloup, nous étions frigorifiés et bien heureux du feu de bois préparé par André et Éliane à Santeny. Une chaude et chaleureuse soirée, comme toujours, où nous avons fait la connaissance de leurs deux charmantes pensionnaires. Paloma est une adorable petite fille de deux ans, qui a bien vite surmonté sa timidité. Quant à DEAL, que nous avons plus ou moins secrètement promis à Copain, la mignonne est encore un peu agitée, il faudra remettre le moment de convoler, attendre que sa fièvre adolescente passe et offre quelques répits pour apprécier les caresses.

Vous dire que notre petit peuple nous attendait avec impatience est un euphémisme. Inutile de les cantonner derrière la grille à notre retour. On se serait cru à l’Olympia un soir de concert à la belle époque de Johnny ! Après les grandes démonstrations de joie est venue l’heure du bilan… GéO n’étant parti que quatre jours, comment Copain a-t-il pu saccager autant de lampes solaires, de toile verte, de tuyaux d’arrosage, de… J’arrête l’inventaire, on va encore se fâcher tout rouge, piquer une colère noire, lui faire une peur bleue… Arc-en-Ciel de sentiments, que sa langue toute rose a tôt fait de tempérer.

19/08/2008

Aileen

Ce dimanche matin de la mi-août où le monde entier n’en finit plus de somnoler mollement, entre JO si lointains et désordres guerriers abscons…
À l’ouverture de ma boîte mail, pas plus de quatre ou cinq messages à l’affichage, mais une ligne, une seule, et j’ai compris avant même de l’ouvrir…
Au centre de cette courte liste, le nom de John et en regard, le prénom d’Aileen.

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Aileen est partie, sans souffrir longuement, à l’autre bout du monde. John me semble presque serein quand je l’appelle aussitôt, il m’offre cette très jolie phrase :
- Je ne suis pas triste pour elle, elle n’a pas vraiment souffert et il ne peut plus lui arriver de mal maintenant, je suis plutôt triste pour moi,… et ça ira…

Entre la mère et le fils, une jolie complicité, une compréhension malgré l’éloignement géographique et les renoncements multiples.

J’ai rencontré Aileen pour la première fois au cours d’une période personnelle bien sombre, et comme le monde n’est pas si mal fait, ce sont les circonstances qui apportent les amitiés les plus sincères et les plus authentiques. Aileen avait franchi la moitié du globe pour visiter John et Jean-Claude, notre rencontre s’est faite autour des maquereaux achetés trois francs six sous sur le port de Honfleur… Un été noir dans mon cœur, une illumination amicale et si légère, une compréhension intuitive, et tant d’humour…
Nos maquereaux sont devenus célèbres, l’emblème de ces vacances normandes, chaumière de Blanche-neige et jardin partagé avec les moutons poursuivis par Aurel et Olivier, comme les gigots ont dû être musclés cette année-là !

Mes pensées sont avec toi, avec vous, là-bas, à Concord West, Australia, juste une adresse pour mes cartes de voeux annuelles, pour elle la maison où elle a passé sa vie entière.


Sans trop chercher, j’ai remis la main sur ces deux photos de notre dernière entrevue dans mon petit paradis ozophoricien, deux petits témoins de cette chaleur amicale. Je les dédie à l’âme d’Aileen qui s’envole quelque part.

Farewell Aileen, I have been so glad to share your friendship, and getting warm up with your kindness.

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11/08/2008

Raie Pastenague

Ce jour de Juillet, la palanquée embarquée sur le Leyla est importante : nous sommes 9, en tout, embarqués sur le bateau de GéO, pique-nique, et matériel usuel : les flacons de protection solaire, les casquettes, les PMT* des invités, et même les croissants prévus par Gabrielle pour affronter les deux petites heures de navigation nécessaires pour atteindre notre havre.

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Le temps magnifique se prête à merveille à l’excursion. Sorti de la baie de Saint-Tropez, où il vaut mieux ne pas songer à flâner en cette période d’animation estivale, GéO a mis le cap sur Taillat, notre repaire habituel. Longeant d’abord longuement le Cap Saint-Tropez et ses mirifiques villas, puis l’interminable plage de Pampelonne aux eaux pratiquement désertes le matin, nous passons le phare de Camarat, haut perché sur son promontoire, admirant au passage quelques demeures dissimulées dans l’épaisseur de la végétation, avant d’atteindre enfin l’anse de Taillat. Abordée par l’Est la presqu’île s’avance franchement dans la mer, rattachée à la côte par un minuscule petit isthme de sable qui en constitue la plage. Les touristes courageux y accèdent à pied, les chanceux dont nous sommes accostent par mer et choisissent, selon le sens de la houle, de mouiller à l’abrupt de la falaise Est ou en contrebas du flanc Ouest, plus vert, résidence des cigales qui stridulent tant que dure le jour.

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Notre premier mouillage aurait pu être idyllique, mer turquoise et menthe à l’eau, en fonction des fonds où alternent sable, algues et rochers. Le Leyla s’approche aisément à moins de 100 m de la côte, nous avons encore 6 à 8 mètres de fond, ce qui est amplement suffisant pour la sécurité. L’eau est magnifiquement transparente, on peut suivre le cheminement serpentin des Saupes qui glissent sous nos pieds. Ce sont des poissons argentés, dont la forme s’apparente aux Sars ou aux dorades plus connues des gourmands, et qui s’en distinguent par une belle barre noire à la naissance de la queue. En revanche, je n’ai encore rencontré personne qui en vante les qualités gustatives. Ce sont des bêtes malignes qu’on n’attrape pas facilement à la ligne, comme si elles devinaient le piège tendu, alors qu’elles ne se font pas prier ordinairement pour partager les reliefs du pique-nique qui les attirent.

Mais voilà, passé le premier bain, alors que nous dressons la table pour le déjeuner, nous percevons « le malaise des sillages », maladie spécifique de la saison. La houle produite par les autres bateaux, les gros navires et les yachts de luxe qui passent au large ou les bateaux de plaisance, plus modestes qui passent trop rapidement près des côtes (nombreux sont les pilotes amateurs qui ignorent les règles de navigation limitant la vitesse des engins à moins de 300 mètres de la côte!). Ce jour-là, le vent sud-est garde les embarcations parallèles à la côte et nous prenons les vagues de sillage par le travers. De tous les aléas de la houle, celui-ci est le moins agréable, qui soulève le bateau d’abord sur un côté et le fait rouler au faîte de son ondulation pour le déposer sur l’autre flanc. La plupart de temps, ce sont d’ailleurs plusieurs vagues qui se succèdent, et ce petit manège devient vite fatigant, car les passagers sont obligés non seulement de veiller à leur propre équilibre, mais encore à l’heure du repas, l’exercice se complique puisqu’il s’agit d’éviter de laisser tomber verres, couverts, assiettes et … leurs contenus. Allez savoir pourquoi, la houle avant-arrière se contrôle mieux, la houle arrière –avant est championne pour déclencher le fameux mal de mer. Dans ce dernier cas, il n’y a plus que GéO pour conserver sourire et appétit. Ce petit cours des aléas pique-nique établi, GéO décide de nous mettre à l’abri des turpitudes sillages, d’autant que Lucas a rencontré une charmante méduse rose, une seule, mais les cloques sur son abdomen et la zébrure de sa main atténuent les envies des baigneurs. Qu’importe, j’ai la recette miracle, quelques massages des brûlures par le vinaigre, Lucas retrouve le sourire. Une demi-heure plus tard, les marques et la douleur s’estompent**.

Nous traversons donc l’anse et GéO choisit un mouillage à portée du Cap Lardier, où le bateau sera moins sensible aux fameux sillages. La table est rapidement réorganisée et nous déjeunons sans souci, sous le regard intéressé d’un grosse mouette, prête à happer sélectivement les miettes que tous s’amusent à lui lancer. Bastien se montre le plus habile, et nous établissons le menu de l’invité-surprise. Elle apprécie peu la tomate, se régale de pain, de pâté de thon, de charcuterie… Au fond, elle partage le régime GéO, plus protéines animales que fibres et sels minéraux, ce qui atteste de l’instinct de survie de notre capitaine, il peut s’adapter à la vie sauvage, je vous le dis !!!


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Vient enfin le moment de chausser les palmes !
Chacun s’équipe, les prévoyants ont emporté leur matériel, nous collectionnons dans un coffre 2 ou 3 paires de palmes, quelques masques et tubas qui ont grandement besoin de prendre l’eau de temps à autre.
Luc se mue en chef de palanquée, suivent Gabrielle et Bastien, Lucas ne tarde pas à se remettre à l’eau, prudent au début, Adrien emboîte le sillage. Pendant que nous nous équipons à notre tour, Luc signale un passage intéressant. Le message se transmet, déformé par les tubas, ce qui donne :
- Hommm, un-un ai, .ite, à ouu
La traduction active nos mises à l’eau comme il se doit !
Nous palmons avec énergie pour rejoindre le groupe formé un peu plus loin, à l’aplomb d’un espace sablonneux. Il faut quand même quelques explications et repères pour que nous distinguions enfin une forme blanche identique au décor blanc, forme dont les flancs battent comme des ailes, par un mouvement ondulant, levant une poussière de sable quand elle frôle le fond, ce qui attire le regard. Nous nous regroupons un moment pour suivre la danse, mais elle finit par se perdre et disparaît. Je suis assez contente, car c’est la première fois que je vois une raie. Luc et Gabrielle, très habitués des plongées dans les mers exotiques, ont reconnu l’espèce et la nomment. Pour eux il s’agit dune raie pastenague, et j’essaie de coincer l’information dans un petit coin de ma tête… J’essaie, comme toujours…


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***

Audrey est aussi satisfaite que moi de la nouveauté, nous nous réjouissons en outre de renouer avec ses petites expéditions qui ont émaillé les vacances familiales de son enfance, surtout à l’époque de Cadaquès.

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Puis la palanquée se dirige vers la côte, protégée par son abord rocheux, labyrinthe idéal pour observer les girelles, les sarans, les oursins qu’on évitera de toucher. Au retour, nouvelle entrevue avec une raie, bien repérée par Sébastien cette fois. Le spectacle s’anime car la demoiselle ondulante semble jouer avec des soles. Trois d’entre elles se positionnent en triangle comme une escorte, tandis que la raie survole une quatrième sole, la dépassant, puis lui cédant la priorité, avant de la recouvrir à nouveau de son corps, ondulant toujours avec cette grâce de Sylphide en représentation. Nous sommes sidérés par cette impression de jeu concerté. Sébastien plonge à plusieurs reprises vers le groupe, mais elles ne se laissent pas rattraper et poursuivent leur manège un poil plus loin, restant hors d’atteinte, sans fuir cependant.
Nous regagnons enfin le plat-bord et je m’empresse de raconter à GéO, resté à bord par sécurité, nos dernières découvertes. Forte de mon savoir tout neuf, j’éprouve une hésitation avant de citer le nom de notre compagne d’aventure :
- Alors, ce genre de raie, toute blanche, assez ronde, avec une queue nettement plus foncée, pas très longue, tu vois, grande comme ça…, la queue comme ça… ( précision à la mano, ça s’entend), je crois que Luc a dit que c’était une raie Pastagas
Éclat de rire généralisé !
- Ah là, tu vas te faire une réputation, on entend bien ton besoin, même si c’est un peu tôt ! Tu vis dans la région depuis trop longtemps, ça déforme ta comprenette ou ça projette tes envies…


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* PMT , jargon des habitués du sous l’eau : comprendre Palmes Masque Tuba, trio de base.
** Une véritable astuce quand on est loin des côtes et du pharmacien. Évidemment, il faut penser à mettre une petite bouteille de vinaigre dans le sac de plage, mais sur le bateau, c’est plus simple, j’en ai toujours dans l’équipet de la cuisine, et c’est vraiment efficace !
NB : ne jamais rincer une brûlure de méduse à l’eau douce, ça propage au contraire le principe urticant …
Pour les piqûres de vive, qui sont horriblement douloureuses également, on regrettera le temps des fumeurs : approcher au plus près de la plaie une source de chaleur comme une cigarette, à défaut une flamme de briquet, chauffe le venin et le contre.

*** renseignements sur Wikipédia,
http://fr.wikipedia.org/wiki/Raie

sur le danger de vouloir toucher cette faune qui n’a pas besoin de l’homme :
http://www.somednat.org/site/spip.php?article18

Pour les photos et l’exploration :
http://www.ocearium-croisic.fr/pages/3-oceans/le-tunnel/la-raie-pastenague.php

http://www.linternaute.com/mer-voile/diaporama/plongee-egypte/1.shtml


30/05/2008

Speedy (dé)confiture.…

Cette semaine, j’ai donc tenu ma première réunion pour Wonderkitch’ en solo !

Voilà un bon moment que je préparais mentalement ce passage à l’acte et m’impatientais de le VIVRE, exactement comme dans ma vie précédente j’anticipais dès le 20 août, nuits et jours, les rentrées scolaires et le moment où je me tiendrai au milieu du nouveau groupe d’élèves le matin de la rentrée. …
Ma nouvelle rentrée a eu lieu ce dernier mercredi de Mai, au milieu d’un groupe d’ « instit’ » justement, clin d’œil malicieux du cours des choses, qui montre une fois encore comment se créent des ponts reliant une page à l’autre de notre vie.

Évidemment, tout pont s’érige sur une structure, et le pilier qui tient la construction, c’est l’Amitié, qui porte aujourd’hui le prénom de Marie-b, amitié en sauts de puce d’une page de vie à une autre, d’épisodes en chapitres clos, nous nous sommes retrouvées l’année dernière à plus de huit cents kilomètres de notre point de départ. Je vous parlais de pont, celui-ci ressemble à un viaduc traversant la géographie physique et sentimentale de nos existences.

Me voici donc à Hyères, dans un quartier tranquille de la ville, accueillie à bras ouverts par la maîtresse de maison, organisatrice de la réunion par amitié pour sa collègue, qui le lui a demandé par amitié pour moi… Les piles du pont, les jambages à l’infini que nos petits dessinent…

J’ai préparé pour cet atelier deux recettes à réaliser ensemble afin de permettre à l’assistance de manipuler les ustensiles, en pensant au matériel intéressant à acheter pour mes clientes potentielles, aux recettes faciles et rapides pour femmes actives, aux outils fonctionnels et séduisants… Parmi ceux-ci, un mixer mécanique , baptisé Speedy par la multinationale, tient habituellement ses promesses de rapidité et de fiabilité… J’ai monté moi-même plusieurs crèmes chantilly à la maison en un tour de main, grâce à l’engin, d’un usage simplissime. Je suis donc certaine de mon effet, dans le déroulé de ma leçon, c’est le passage le plus probant et, sans aucun doute, petite Perrette débutante, je me réjouis à l’avance du régal offert à mon public, je prévois les conséquences concrètes de la dégustation sur les ventes…

Las, comme Perrette justement, c’est bien dans ma certitude sereine que se niche le caillou qui fait trébucher !
Ce jour-là, il règne sur toute la région un ciel orageux, bas, chaud, humide. La maîtresse de maison nous a installées sur la terrasse qui jouxte la cuisine. Par commodité, elle a sorti tous les ingrédients requis pour la recette du moelleux au chocolat, y compris la crème fleurette entière, à réserver pour la seconde phase de l’opération dégustation, dès que le gâteau sera cuit dans le four à micro-onde. J’ai bien repéré au cours de la démonstration ce petit pot suant sur la table, et tout en poursuivant la conversation, je me suis glissée dans la pièce attenante pour le remiser dans le réfrigérateur. Mais de fait, la cuisson du biscuit ne demandant que six minutes, nous passons rapidement à la phase sauce Chantilly …Et le flacon de fleurette est ressorti aussitôt…
Plusieurs convives se portent volontaires pour exécuter les rotations de la manivelle sur le fameux speedy, j’ai prévenu qu’une soixantaine de tours suffisait pour obtenir une crème fouettée ferme et aérée . Nous comptons allègrement la minute d’efforts accomplis, mais en soulevant le couvercle, les mines gourmandes se mâtinent de déception : la crème est encore liquide, onctueuse concédons-nous, mais son ruissellement sur les pales interdit de la considérer comme Vraie Chantilly.

Il en faut plus que ça pour désorienter des enseignantes, habituées à considérer que l’échec nourrit l’apprentissage ! Une seconde volontaire prend le relais sans plus de succès. Nous élaborons alors une stratégie de recherche, retenant l’hypothèse que le climat orageux et la chaleur lourde ont modifié la réaction des produits. Une première fois, nous introduisons le bol du Speedy dans le congélateur, cinq minutes, le temps de s’extasier sur le moule en silicone qui permet un démoulage parfait à chaud, sans usage de matières grasses : ah, la bonne conscience des gourmandes !
Le délai de congélation se révèle insuffisant pour rattraper la consistance désirée, malgré le redoublement d’énergie sur la manivelle, que je reprends à mon tour, après notre hôtesse… Cette fois, le chœur des profs décide une sanction de quinze minutes, que nous mettons à profit pour éplucher les légumes destinés à l’estouffade de concombre aux crevettes… Hum, à l’énoncé de la recette, notre imagination titillent nos papilles… Françoise, une des assistantes, manifestement connaisseuse et fan des produits Wonderkitch’, entonne la démonstration des qualités de la cocotte, du coupant inaltérable des couteaux, de l’efficacité du tranchoir à légumes… Je me reposerais presque, si mon petit ego ne se tourmentait du coulant de la sauce blanche !
Les légumes enfournés dans la cocotte-miracle, nous nous résignons à déguster notre excellent moelleux au chocolat sous son lit de crème couvrante…
C’est savoureux, délicieux, onctueux, crémeux, mais pas moussant, pas aérien, alors que nos palais étaient en droit d’accéder à la sensation du moelleux de la pâte fondant dans le nuage délicat de la crème, les deux matières s’enchevêtrant sous la pression combinée de la langue et du palais.
Me voilà fort déconfite, malgré l’intérêt que mes compagnes accordent aux catalogues et aux différents ustensiles que j’ai exposés dans le séjour.… L’après-midi tire à sa fin, chacune a fait son profit de l’expérience, j’empoche mes commandes, grandement satisfaite du succès de l’entreprise et de l’émulation dynamique dont je me suis abreuvée, mais derrière l’euphorie de la performance persiste la vision d’un nuage floconneux s’écrasant mollement dans l’assiette, dégoulinant sans la moindre élégance sur ma renommée culinaire à peine constituée…

06/05/2008

Émotion

Un numéro de portable …et la voix qui répond n’a pas changé. Quelque part sur le canal de Bourgogne, il enchaîne si naturellement et calmement, à mon questionnement :
- Oh oui, bien sûr je reconnais ta voix, elle n’a pas changé du tout !
La sienne non plus n’a pas changé, il parle avec calme et douceur, comme à cette période vieille de…, je n’ose le calculer, mais oui, voilà plus de trente ans, trente-trois même, carrément.
Nous avons longuement échangé des nouvelles, nos enfants respectifs d’abord, bien entendu. Il a une fille de vingt-trois ans, que je n’ai jamais vue, puisqu’il était reparti depuis longtemps. Mais l’oncle Jimmy de mes AA les a vus naître, il a été témoin de tant de nos joies, de nos efforts pour bâtir notre vie et aménager l’Atelier. Durant ces années de bonheur inconscient, il était à nos côtés, plus frère que nos fratries biologiques.

Parfois, quand je rangeais la cuisine en fin de soirées animées, il venait m’aider gentiment à ces petites tâches et nous discutions à voix feutrées, pour ne pas déranger les bébés qui dormaient dans les chambres contiguës. Tandis que des conversations encore fiévreuses qui se poursuivaient dans le séjour jaillissaient de temps à autre les derniers éclats, je m’employais à limiter la pagaille et James ponctuait mes gestes de remarques apparemment anodines … Il cassait la solitude de la maîtresse de maison, il adoucissait le dilemme entre profit des petites heures nocturnes au salon et préparation des biberons de l’aube et autres joies maternantes. Puis, le dernier toujours, il quittait l’Atelier, traversait Paris juché sur son immense vélo antique, pour dormir quelques heures lui aussi et revenir en fin de matinée prêter la main aux interminables travaux entrepris pour transformer le hangar de verre en appartement.
Il y a eu ces dix-huit mois de vie quasi commune, il y a eu l’épisode tragi-comique de sa chute sur la dalle de pierre qui nous servait de table, à cause d’une échelle mal calée. Il y a eu tant et tant d’anecdotes, de gags liés à l’approximation de la langue, de gestes gentils, de mots d’auteur qui dressent nos balises d’amitié:
- Je n’ai pas dit merci parce que chaque fois, on me répond : c’est pas la peine
Et à moi, ces soirs de fatigue où je ne me sentais plus du tout en forme, à force de petites nuits dans ce chantier voué à l’éternité, il savait me tendre la vaisselle sale avec ces quelques mots articulés de sa voix si douce :
- Euoh toua, Eodil, tou es quand même la Plou Belle !

01/03/2008

Du soleil au coeur…

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Du soleil au cœur, autant de bonheurs offerts et partagés, ce mois de février a largement tenu ses promesses…
Même Haut et Fort s’en mêle: après la panique du retour et son admin inaccessible, le voilà tout à coup qui nous ouvre d’autres possibles, on essaiera, promis.

De la chaleur de votre amitié, Mireille et Pierre, soyez remerciés. Des balades bucoliques au pays de l’Erdre et de la Loire, toutes rencontres qui méritent qu’on y revienne et s’attarde. Et la découverte de Nantes, bords de Loire romantiques et romanesques, Histoire lumineuse ou sombre, histoires d’eau encore au cours aventureux, histoire de royauté, de loyauté et de beauté, de conflits et d’affrontements, d’horreurs et d’abus, de bonne et mauvaise conscience plus ou moins assumées.
À l’échelle de notre temps présent, ce voyage à Nantes illustre l’Amitié, mille moments de partage sincère sans complexe, et des joies intenses, comme ce dernier soir sur l’Erdre, de Folie en Folie nous nous sommes imprégnés des images d’un monde inaccessible et magique sur lequel veillent quelques hérons juchés au sommet des arbres…

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Du soleil encore sur la côte vendéenne, un coup de cœur pour Saint Gilles et MJ que je retrouve égale à elle-même, généreuse et authentique, accueil chaleureux de tous, même Olympe semble me reconnaître malgré les années… Bonheur de croiser mes neveux adultes, d’écouter les projets, d’entendre les espoirs et leurs attentes, d’imaginer bientôt la maison rénovée et les travaux aboutis, de la Vie encore qui se déroule et décline ses épisodes imprévus. À croiser ainsi nos vies à intervalles distendus, il y a bien sûr des trous, que comblent la chaleur de leurs cœurs et la simplicité de leurs façons d’être. Il y a eu de la gaîté autour du gigantesque plateau de fruits de mer, des balades au marché de Croix de Vie ou sur le remblai de Saint Gilles. Et puis, comme si elle avait deviné mon attente, la mer justement venue à notre rencontre jusqu’à la limite du sable, mêlant le chant du ressac au dialogue de nos retrouvailles.

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Retour sur nos terres, pour accueillir Aurélien et prolonger la ronde des moments doux. Quatre jours volés au temps et à l’agitation du travail, arrêt marqué pour s’offrir mutuellement de l’écoute et de la tendresse. À la terrasse du café de Saint Max, nous sirotons quelques confidences sous les platanes dénudés ; un festin de fête se concocte à trois dans le ventre de la maison, l’expert furète dans mon disque dur pour installer un navigateur Internet plus souple, complicité et taquineries familières, quelle mère n’en rêve pas ?
Tandis qu’il est retourné dans Sa Vie, nous nous réjouissons tous deux de son apaisement. Je me sens fière de lui qui bâtit hors des chemins balisés, même si les obstacles rencontrés se dressent plus escarpés et plus rudes. Chaque étape franchie s’affiche plus belle et chaque acquis consolide son parcours. Voilà encore un vœu exaucé par ce beau mois de Février.

Je ne peux pas achever ce billet hyper sentimental sans adresser un remerciement vif et ému à toutes celles et tous ceux, amis au grand coeur, qui nous ont adressé des encouragements pour franchir La Porte du Nouveau Millésime. Ces événements, que le hasard a voulu presque aussi conjoints que nous le sommes réellement, sont à prendre en bonne part, une année de plus c’est toujours ça de pris sur le destin, et nous savons tous que celui-ci n’est pas toujours si généreux…

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14/02/2008

Saint Valentin, évidemment…

Avant de vous lâcher pour un petit moment, puisque Mireille et Pierre nous attendent,
et les vagues de l'Océan chanteront pour nous…
De Nantes à Saint Gilles en passant par…
Voici une petite distraction concoctée rien que pour vous, les fidèles et les autres, ceux qui découvrent par hasard ou par on-dit…

Jouissons donc des jours et des heures qui nous sont donnés
de l'amour , de l'amitié
et de tout ce qui peut se partager .

À bientôt.



25/11/2007

Le Trèfle à quatre feuilles

J’ai un petit don subtil et parfaitement inutile, que je pratique depuis toujours et en fais profiter ceux que j’aime. Bien que je ne dispose pas d’une vue particulièrement aiguisée, mes yeux sont immanquablement attirés par un détail minuscule au milieu de n’importe quel parterre herbu.

Je trouve des trèfles à 4 feuilles.

Oui, je sais, c’est idiot, sans intérêt. D’autant que je me garde bien d’être superstitieuse, ça pourrait me porter malheur.
Alors, des trèfles, de Normandie, de Bretagne ou d’Ozoir, j’en ai trouvé des centaines depuis mon enfance, avec de larges folioles bien formés, d’autres moins réguliers, que j’ai séchés et conservés dans les livres au hasard de mes lectures, dans la pochette de mon permis de conduire. Bien plus souvent, j’en ai offert à toute personne présente lors de mes cueillettes-miracles, mes parents, mes amis, mes enfants évidemment. Ils ont eu des trèfles à quatre feuilles en toute occasion, matin, midi et soir, pour peu que nous soyons à la campagne. Avec eux, le jeu consistait à faire un voeu secret, que la pauvre plante était censée réaliser… Personne n’a jamais pensé à en vérifier le pouvoir. J’en avais même trouvé un sur le terre-plein de la place de la Nation, que j’avais aussitôt offert à Alice, une amie de ma belle-mère. Cette personne déjà âgée avait justement subi une violente agression physique dans le hall de l’immeuble où elle lui rendait visite par un bel après-midi de printemps. Les multiples contusions résultants de l'attaque avaient endommagé sérieusement sa vue et pendant une longue période, Alice n’osait plus se déplacer seule, même dans ce quartier populaire et vivant. L’accompagnant donc pour quelques courses sur le Cours de Vincennes, nous traversions en toute hâte la place en diagonale, coupant par l’ancienne fontaine, devenue simple plate-bande gazonnée. Comme Alice était essoufflée, elle s’était s’appuyée sur le muret de l’ancien bassin. C’est donc là, au milieu de quelques malheureux brins d’herbe gorgés d’affreuses toxines et de gaz d’échappement, que j’avais sorti la pépite verte, symbole de chance et de bonheur. Alice l’avait acceptée de bon cœur, elle était une amie charmante, témoignant d’une éducation courtoise comme les vieilles dames de sa génération, et m’avait remerciée d’une aimable plaisanterie.


Dans notre jardin provençal, les trèfles sont beaucoup plus rares, mais au bout d’un an ou deux, mes yeux ont à nouveau automatiquement décelé cette petite anomalie symétrique, parmi les herbes sauvages qui comblent les trous de ce que nous osons appeler pompeusement la pelouse.

Cet été, alors que je traverse la dite pelouse pour servir notre repas, malgré le plat chaud que je tiens en main, je détecte soudainement ce brin exceptionnel au milieu d’une touffe anarchique. Posant rapidement mon plat au sol, je cueille aussitôt délicatement mon trophée et l’offre à Marie-Geneviève et son mari Daniel, histoire de provoquer un sourire de détente anodine sur leurs visages fatigués et abîmés par la maladie. Le trèfle est bien développé et la tablée s’exclame, « Tiens, un peu de chance, ça tombe bien ! », Marie-Geneviève profite de cette opportunité pour encourager Daniel à montrer un peu plus d’appétit, de bonne grâce, notre malade reprend une bouchée de légumes… Puis pose le porte-bonheur de côté sur la table. Et nous n’y pensons plus.

Ce soir-là pourtant, alors que Daniel, guère vaillant, a déjà quitté la terrasse pour rejoindre sa chambre, nous rangeons la maison tristement, en commentant les efforts de la journée, les espoirs que nous essayons d’entretenir malgré les signes manifestes de déclin. Tout à coup, Marie-Geneviève m’interpelle :
-Mais qu’est-ce qu’on a fait de mon trèfle à quatre feuilles ? Je l’avais posé là, ce midi…
Nous nous regardons, vaguement confuses.
Gé intervient :
- Sur les serviettes en papier ? Alors il a été jeté.
L’espace d’un instant, je dois avouer que nous ressentons toutes deux une réelle déception, éphémère autant que puérile, mais j ‘ai ressenti son pincement de cœur dans la clarté triste de son regard …
Aucun de nous n’accorde évidemment de signification à cet incident, mais ce trèfle à quatre feuilles jeté nous a cruellement manqué.…