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11/08/2008

Raie Pastenague

Ce jour de Juillet, la palanquée embarquée sur le Leyla est importante : nous sommes 9, en tout, embarqués sur le bateau de GéO, pique-nique, et matériel usuel : les flacons de protection solaire, les casquettes, les PMT* des invités, et même les croissants prévus par Gabrielle pour affronter les deux petites heures de navigation nécessaires pour atteindre notre havre.

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Le temps magnifique se prête à merveille à l’excursion. Sorti de la baie de Saint-Tropez, où il vaut mieux ne pas songer à flâner en cette période d’animation estivale, GéO a mis le cap sur Taillat, notre repaire habituel. Longeant d’abord longuement le Cap Saint-Tropez et ses mirifiques villas, puis l’interminable plage de Pampelonne aux eaux pratiquement désertes le matin, nous passons le phare de Camarat, haut perché sur son promontoire, admirant au passage quelques demeures dissimulées dans l’épaisseur de la végétation, avant d’atteindre enfin l’anse de Taillat. Abordée par l’Est la presqu’île s’avance franchement dans la mer, rattachée à la côte par un minuscule petit isthme de sable qui en constitue la plage. Les touristes courageux y accèdent à pied, les chanceux dont nous sommes accostent par mer et choisissent, selon le sens de la houle, de mouiller à l’abrupt de la falaise Est ou en contrebas du flanc Ouest, plus vert, résidence des cigales qui stridulent tant que dure le jour.

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Notre premier mouillage aurait pu être idyllique, mer turquoise et menthe à l’eau, en fonction des fonds où alternent sable, algues et rochers. Le Leyla s’approche aisément à moins de 100 m de la côte, nous avons encore 6 à 8 mètres de fond, ce qui est amplement suffisant pour la sécurité. L’eau est magnifiquement transparente, on peut suivre le cheminement serpentin des Saupes qui glissent sous nos pieds. Ce sont des poissons argentés, dont la forme s’apparente aux Sars ou aux dorades plus connues des gourmands, et qui s’en distinguent par une belle barre noire à la naissance de la queue. En revanche, je n’ai encore rencontré personne qui en vante les qualités gustatives. Ce sont des bêtes malignes qu’on n’attrape pas facilement à la ligne, comme si elles devinaient le piège tendu, alors qu’elles ne se font pas prier ordinairement pour partager les reliefs du pique-nique qui les attirent.

Mais voilà, passé le premier bain, alors que nous dressons la table pour le déjeuner, nous percevons « le malaise des sillages », maladie spécifique de la saison. La houle produite par les autres bateaux, les gros navires et les yachts de luxe qui passent au large ou les bateaux de plaisance, plus modestes qui passent trop rapidement près des côtes (nombreux sont les pilotes amateurs qui ignorent les règles de navigation limitant la vitesse des engins à moins de 300 mètres de la côte!). Ce jour-là, le vent sud-est garde les embarcations parallèles à la côte et nous prenons les vagues de sillage par le travers. De tous les aléas de la houle, celui-ci est le moins agréable, qui soulève le bateau d’abord sur un côté et le fait rouler au faîte de son ondulation pour le déposer sur l’autre flanc. La plupart de temps, ce sont d’ailleurs plusieurs vagues qui se succèdent, et ce petit manège devient vite fatigant, car les passagers sont obligés non seulement de veiller à leur propre équilibre, mais encore à l’heure du repas, l’exercice se complique puisqu’il s’agit d’éviter de laisser tomber verres, couverts, assiettes et … leurs contenus. Allez savoir pourquoi, la houle avant-arrière se contrôle mieux, la houle arrière –avant est championne pour déclencher le fameux mal de mer. Dans ce dernier cas, il n’y a plus que GéO pour conserver sourire et appétit. Ce petit cours des aléas pique-nique établi, GéO décide de nous mettre à l’abri des turpitudes sillages, d’autant que Lucas a rencontré une charmante méduse rose, une seule, mais les cloques sur son abdomen et la zébrure de sa main atténuent les envies des baigneurs. Qu’importe, j’ai la recette miracle, quelques massages des brûlures par le vinaigre, Lucas retrouve le sourire. Une demi-heure plus tard, les marques et la douleur s’estompent**.

Nous traversons donc l’anse et GéO choisit un mouillage à portée du Cap Lardier, où le bateau sera moins sensible aux fameux sillages. La table est rapidement réorganisée et nous déjeunons sans souci, sous le regard intéressé d’un grosse mouette, prête à happer sélectivement les miettes que tous s’amusent à lui lancer. Bastien se montre le plus habile, et nous établissons le menu de l’invité-surprise. Elle apprécie peu la tomate, se régale de pain, de pâté de thon, de charcuterie… Au fond, elle partage le régime GéO, plus protéines animales que fibres et sels minéraux, ce qui atteste de l’instinct de survie de notre capitaine, il peut s’adapter à la vie sauvage, je vous le dis !!!


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Vient enfin le moment de chausser les palmes !
Chacun s’équipe, les prévoyants ont emporté leur matériel, nous collectionnons dans un coffre 2 ou 3 paires de palmes, quelques masques et tubas qui ont grandement besoin de prendre l’eau de temps à autre.
Luc se mue en chef de palanquée, suivent Gabrielle et Bastien, Lucas ne tarde pas à se remettre à l’eau, prudent au début, Adrien emboîte le sillage. Pendant que nous nous équipons à notre tour, Luc signale un passage intéressant. Le message se transmet, déformé par les tubas, ce qui donne :
- Hommm, un-un ai, .ite, à ouu
La traduction active nos mises à l’eau comme il se doit !
Nous palmons avec énergie pour rejoindre le groupe formé un peu plus loin, à l’aplomb d’un espace sablonneux. Il faut quand même quelques explications et repères pour que nous distinguions enfin une forme blanche identique au décor blanc, forme dont les flancs battent comme des ailes, par un mouvement ondulant, levant une poussière de sable quand elle frôle le fond, ce qui attire le regard. Nous nous regroupons un moment pour suivre la danse, mais elle finit par se perdre et disparaît. Je suis assez contente, car c’est la première fois que je vois une raie. Luc et Gabrielle, très habitués des plongées dans les mers exotiques, ont reconnu l’espèce et la nomment. Pour eux il s’agit dune raie pastenague, et j’essaie de coincer l’information dans un petit coin de ma tête… J’essaie, comme toujours…


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***

Audrey est aussi satisfaite que moi de la nouveauté, nous nous réjouissons en outre de renouer avec ses petites expéditions qui ont émaillé les vacances familiales de son enfance, surtout à l’époque de Cadaquès.

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Puis la palanquée se dirige vers la côte, protégée par son abord rocheux, labyrinthe idéal pour observer les girelles, les sarans, les oursins qu’on évitera de toucher. Au retour, nouvelle entrevue avec une raie, bien repérée par Sébastien cette fois. Le spectacle s’anime car la demoiselle ondulante semble jouer avec des soles. Trois d’entre elles se positionnent en triangle comme une escorte, tandis que la raie survole une quatrième sole, la dépassant, puis lui cédant la priorité, avant de la recouvrir à nouveau de son corps, ondulant toujours avec cette grâce de Sylphide en représentation. Nous sommes sidérés par cette impression de jeu concerté. Sébastien plonge à plusieurs reprises vers le groupe, mais elles ne se laissent pas rattraper et poursuivent leur manège un poil plus loin, restant hors d’atteinte, sans fuir cependant.
Nous regagnons enfin le plat-bord et je m’empresse de raconter à GéO, resté à bord par sécurité, nos dernières découvertes. Forte de mon savoir tout neuf, j’éprouve une hésitation avant de citer le nom de notre compagne d’aventure :
- Alors, ce genre de raie, toute blanche, assez ronde, avec une queue nettement plus foncée, pas très longue, tu vois, grande comme ça…, la queue comme ça… ( précision à la mano, ça s’entend), je crois que Luc a dit que c’était une raie Pastagas
Éclat de rire généralisé !
- Ah là, tu vas te faire une réputation, on entend bien ton besoin, même si c’est un peu tôt ! Tu vis dans la région depuis trop longtemps, ça déforme ta comprenette ou ça projette tes envies…


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* PMT , jargon des habitués du sous l’eau : comprendre Palmes Masque Tuba, trio de base.
** Une véritable astuce quand on est loin des côtes et du pharmacien. Évidemment, il faut penser à mettre une petite bouteille de vinaigre dans le sac de plage, mais sur le bateau, c’est plus simple, j’en ai toujours dans l’équipet de la cuisine, et c’est vraiment efficace !
NB : ne jamais rincer une brûlure de méduse à l’eau douce, ça propage au contraire le principe urticant …
Pour les piqûres de vive, qui sont horriblement douloureuses également, on regrettera le temps des fumeurs : approcher au plus près de la plaie une source de chaleur comme une cigarette, à défaut une flamme de briquet, chauffe le venin et le contre.

*** renseignements sur Wikipédia,
http://fr.wikipedia.org/wiki/Raie

sur le danger de vouloir toucher cette faune qui n’a pas besoin de l’homme :
http://www.somednat.org/site/spip.php?article18

Pour les photos et l’exploration :
http://www.ocearium-croisic.fr/pages/3-oceans/le-tunnel/la-raie-pastenague.php

http://www.linternaute.com/mer-voile/diaporama/plongee-egypte/1.shtml