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20/05/2012

Un p'tit coin de Paraïs

 Si la météo exécrable n’avait écourté notre visite à Sainte Maxime, je serais passée à côté d’un joli moment au Paraïs…Il y a des rencontres qui embellissent d’un coup vos journées.  Celle que j’ai eu la chance de vivre vendredi dernier est de celle-là.

 La médiathèque de Saint Maximin, en lien avec la libraire Jardin des Lettres,   avait organisé la réception de Sylvie Giono, fille de l’écrivain, à propos du livre qu’elle a écrit sur leur maison de Manosque. On sait, et je l’ai entendu rapporter encore très récemment, que Giono écrivait retranché dans son bureau, sans puiser directement  son inspiration dans le suc de la rue. Certains y voient l’occasion de formuler un reproche, un dédain pour ce rêveur qui n ‘ancrait pas ses personnages dans la réalité autour de lui.  D’autres en profitent pour souligner que ses créatures sont de pures inventions, que l’humanité ne peut pas se réduire à des caractères posés sur le papier…

 

Pour ma part, j’ai dévoré les romans de l ‘écrivain dans ma jeunesse, et je dois dire qu’ils ont creusé alors un sillon très profond dans ma mémoire. Je n’ai découvert la Provence géographique que plus tard. Mais pas une fois au cours de mes incursions dans l’arrière-pays, pas une fois vous dis-je, je n’ai manqué d’y voir  ses silhouettes solitaires et affairées dans les collines âpres de l’arrière pays, sur les plateaux illuminés de lavande du Lubéron, dans la découpe grise des crêtes préalpines… Regain, Collines, les âmes fortes…Et la fuite éperdue de Pauline de Théus à travers tout le pays pendant l’épidémie de peste de Manosque. C’est que Giono est de la trempe des Écrivains, ceux qui dessinent un univers tellement fort que la réalité s’estompe avant de s’efforcer d’entrer dans le cadre  de nos imaginaires.

 

D’abord, Sylvie Giono impressionne par le calme et la simplicité de sa présence; cette grande dame s’exprime face à l’auditoire avec la spontanéité et l’aisance d’une amie qui partage un moment de souvenirs. Elle est aidée au long de son discours par deux complices, professeurs de lettres régionaux, qui se passionnent pour l’œuvre de l’écrivain. S’ils sont manifestement trop jeunes pour l’avoir jamais rencontré,   il est clair qu’ils vivent, respirent, se nourrissent et s’abreuvent « Giono ». La maison du Paraïs n’a pas de secrets pour eux, et leurs relations avec la fille de l’écrivain semblent révéler une pratique respectueuse mais  amicale.

 

Le jeu des questions-réponses se déroule donc dans une atmosphère bon enfant, les deux acolytes formulant les thèmes qui servent de fil conducteur à cette visite guidée de l’univers de l’écrivain, Sylvie Giono décrit avec précision et humour les rites du créateur, son besoin de calme tempéré par l’assurance que sa famille réunie formait un rempart protecteur contre les intrusions.  Les anecdotes abondent pour décrire l’ambiance familiale, depuis  les moments d’écoute musicale  rassemblant toute la tribu sur la terrasse de la maison, les repas agrémentés du récit des progrès  du roman en cours,   les relations aux objets d’art fétiches du romancier, la découverte de la bibliothèque somptueuse,    car Giono père est un mentor avisé des lectures de ses filles. On apprend ainsi qu’Élise Giono, l’épouse,  veille à la ponctuation et l’accentuation des tapuscrits de son époux, tandis que Madame Mère exerce une sorte de régence autoritaire sur la tribu. Il faut dire que l’univers du grand homme est féminin : outre sa femme et ses deux filles, la maisonnée abrite mère et belle-mère, mais aussi Fine, la domestique piémontaise incontournable, qui prend ses repas à la table familiale. Cet homme-là, me direz-vous, peut facilement se retrancher des contingences matérielles, six  femmes s’activent à lui fournir les conditions de paix dont il a besoin pour œuvrer.

 

 À travers le regard bienveillant de sa fille, il semble que Jean Giono a pu créer dans un cocon idéal. Son œuvre cependant ne donne pas vie à des personnages  au destin lumineux et aisé. La nature semble souvent façonner les êtres en sécheresse et en dureté, pour s’affronter à la rocaille et aux désirs inassouvissables… C’est que le rêveur plumitif  ne s’est pas fait que des amis, dans la bonne ville de Manosque. Un début de carrière très malheureux dans la banque s’est achevé par une banqueroute familiale, l’homme n’aura manifestement jamais l’argent pour divinité. Mais ça ne suffira pas pour tenir à distance les envieux, les jaloux et les susceptibles. Jean Giono a traversé le premier conflit mondial en soldat, il en est revenu fondamentalement  pacifiste. Cette position affirmée ne l’a pas protégé des attaques des deux camps : on lui a reproché des photographies prises au Paraïs parues dans la presse allemande, en négligeant la chronologie des clichés, bien antérieure au début du conflit ; On n’a pas voulu prendre en compte les risques courus quand il a caché chez lui des réfugiés  comme   la femme de Max Ernst ou le pianiste Meyerowitz qui refusait de se cacher sans son piano!*. De sorte que par deux fois, Giono sera emprisonné quand sonnera l’heure des comptes.

 C’est avec une distance positive que Sylvie Giono évoque ces heures sombres.  Elle semble perpétrer ainsi ce caractère essentiel qu’elle prête volontiers à son  père. À tous moments, elle souligne en effet la générosité de cet homme qui tenait table ouverte, savait accueillir les visiteurs alors même que son cerveau continuait à jointer ses intrigues en arrière-plan.  Par son intelligence affable, cette grande dame  contribue à la mémoire de l’écrivain autant qu’à celle de l’homme. Ces deux heures sont passées trop vite et nous ont apporté une grande fraîcheur. Reste une véritable envie de retrouver le plaisir des lectures : mon été 2012 sera sans doute agrémenté de retrouvailles « Giono », qu’on se le dise !!!

 

Jean Giono à Manosque, sous titré LE PARAÏS, la maison d’un rêveur, paru chez Belin en février 2012 ISBN 978-2-7011-5980-5

 * anecdote rapportée page 48

 

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Pour les amateurs disponibles à cette période, Sylvie Giono fait part d’un festival musical à Gréoux les bains en Juin, en relation avec les  animations de la maison jean Giono.

 

 

 

11/11/2010

Villa de rêve ( 2)

Villa Kerylos

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Certains destins semblent couler de source.
Les talents, les dons révélés à la source jaillissent et coulent d’une étape à la suivante sans heurt, dispensant la fraîcheur et le pétillement d’une intelligence  vive et profonde.
 Quelquefois, c’en est presque agaçant…
Nul doute que les frères Reinach ont produit cet effet, quand ils rayonnaient tous trois sur les Lettres Françaises et la vie intellectuelle de notre  IIIème République, par ailleurs  tellement conformiste.

Mais tant de talents se paient parfois au prix fort, et je vous conterai tout à l’heure les détours qu’une dynastie endosse parfois… Laissez-moi vous conduire d’abord vers cette seconde villa de rêve, pour tenir mes engagements du précédent bulletin…

***



Souvenez-vous, nous sommes encore à Saint Jean Cap Ferrat, dans les somptueux jardins de la Villa Éphrussi

De ce belvédère, la vue s’étend sur la côte, avec pour seule limite la montagne qui prend pied dans la Grande Bleue.  L’agglomération voisine est  Beaulieu, la bien  nommée… Elle abrite sur sa côte sinueuse, la Pointe des fourmis.  

Par-delà les arbustes qui bordent l’ Eden, au bout  de cette avancée, il est aisé de repérer une villa toute blanche …

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À vol d’oiseau, quelques centaines de mètres nous séparent de Kerylos,  lhirondelle de mer, née de l’imagination érudite de Théodore Reinach, au début du XXème siècle. Mais avant de vous inviter à pénétrer cette maison extraordinaire, revenons sur la personnalité de ce grand humaniste bâtisseur …

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Vue depuis  la mer
 
***

 


Théodore Reinach naquit en  1860, troisième fils d’une famille originaire d’Allemagne, appartenant à la Grande Finance internationale. Comme ses frères Joseph et Salomon, Théodore reçut une éducation soignée et rigoureuse. L’intelligence érudite des membres de la fratrie devînt vite légendaire, de sorte qu’ils furent surnommés les JST, « Je Sais Tout », en référence aux initiales de leurs prénoms.

Joseph, l’aîné, s’illustra rapidement dans les milieux politiques et , député, devint même un collaborateur éclairé de Gambetta.

Salomon, le cadet ,préférait l’Étude à l’action politique : l’Institut  de France lui offrit le cadre rêvé pour ses chères recherches et très naturellement, il fut nommé Conservateur du musée national des Antiquités.

Le benjamin,  Théodore,  s’affranchit de ses deux frères en empruntant à l’un  et à l’autre, et conjuguant à loisirs tous les talents,  docteur en droit et en Lettres, il fut successivement juriste, enseignant spécialiste de l’Histoire Grecque Ancienne… S’affirmant en tant qu’ archéologue,  spécialiste du déchiffrage des papyrus, numismate, musicologue, il fut reçu à l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres, et obtient même, quatre ans avant son décès, la Chaire de Numismatique au Collège de France  … Cependant sa belle énergie l’inclinait également vers la Chose Publique et à l’instar de Joseph, la députation lui tendait les bras.  Il établit d’abord son fief en Savoie, de 1906 à 1914. Veuf de sa première femme, dont il eut deux filles, il épousa en secondes noces la nièce d’un certain …Maurice Éphrussi, tiens tiens, voilà qui nous ramène à la Riviera.  Quatre fils naquirent de cette union, dont  Léon, époux de Béatrice de Camondo, fille du célèbre collectionneur Moise Camondo, déportés tous deux en 1943 avec leurs deux enfants.

Avant d’entreprendre le projet Kérylos, Théodore avait acquis  dès  1901 à La Motte-Servolex en Savoie un château du XVIIIème siècle qu’il avait entrepris de rénover entièrement dans l’Esprit du style Louis XIII. L’expérience lui plut, de sorte que l’achat du domaine de Beaulieu lui semblât l’opportunité de renouveler le défi . Cette fois, il  imagina et  fit réaliser une Villa sur le modèle de la Grèce Hellénistique, sujet qu’il connaissait parfaitement.
Dans cette optique, il requît les talents d’un architecte dont la renommée reste attachée à la villa, bien qu’en son temps, il fut déjà reconnu et honoré de ses pairs : Emmanuel Pontremoli, grand prix de Rome en 1890, à qui on doit notamment l’Institut de Paléontologie humaine à Paris ou encore la grande synagogue de Boulogne Billancourt. Sa réputation lui valut la nomination à la direction  de la section architecture aux Beaux Arts.

 



***

 


Revenons maintenant aux  magnifiques années de la Belle Époque : la révolution des technologies, l’amélioration des communications, les voyages et la mode des séjours balnéaires ont lancé la Riviera.  Essayons d’imaginer le panorama de la côte d’Azur vierge de toutes les constructions  actuelles, serrées sur les flancs de la montagne : Ne conservez au fond des yeux que  l’azur du ciel, le  bleu profond de la mer, le vert sombre des pins, la pierre blanche des parois rocheuses :

 

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À deux pas de Monte Carlo, les entrepreneurs se régalent… Sans les actuelles grues qui tournoient sans relâche dans nos cieux tropéziens, les belles et majestueuses demeurent s’élaborent pour loger la bonne société aux finances florissantes. Les grands hôtels n’y suffisent plus, il faut construire. Théodore Reinach a encore les pieds dans sa circonscription savoyarde, mais il est avisé et sait qu’il réalise une belle affaire en se portant acquéreur d’un terrain de 2000 mètres carrés au bout de la Pointe des Fourmis, sur la commune de Beaulieu. Nous sommes au tout début du XXème siècle, ce qui n’empêche pas notre Humaniste de projeter ses désirs vers le passé, au cœur de l’Histoire qu’il admire. Il choisit de faire  ériger sur ce bout de terre méditerranéenne une demeure intemporelle, telle que les Anciens l’auraient bâtie.
 Il ne s’agit pas de construire une bâtisse à la manière  de…, en ajoutant une colonnade en guise de Péristyle pour  porche d’entrée. Le cahier des charges précise qu’il faut réinventer les techniques, les arts, le mode de vie  d’une famille comme si elle coulait ses jours heureux à Délos, au II ème siècle avant Jésus Christ.

Il faut  six ans à Emmanuel Pontremoli pour mener à bien son chantier, de 1902 à 1908, mais l’ingéniosité, la rigueur  et …Les moyens mis à sa disposition  lui permettent de livrer enfin la Villa Kérylos à son propriétaire, qui baptise chaque pièce du nom de sa fonction : Andron pour le grand  salon où se réunissent ces messieurs,  ou balaneions pour les thermes, le triklinos désigne la salle à manger …
Marbre de carrare, bois exotique rare, citronnier blond composent les matériaux utilisés. Outre l’organisation de l’espace déterminé selon le mode de vie, la décoration reçoit un soin particulier : fresques peintes et mosaïques imposent aux visiteurs un respect qui laisse coi.
Dès l’entrée, le visiteur est accueilli par ces mosaïques saisissantes de vie et de relief :

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Tout de suite à gauche, le balanéions offre aux hôtes  la piscine  de marbre et mosaïque aux fins de relaxation :

 

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Cœur de l’édifice , le pérystyle central gouverne l’accès à toutes les pièces privées, nous en admirons les fresques murales :

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   En relation avec la fonction des salles, sols et murs constituent les supports aux illustrations de scènes mythologiques :

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Ces derniers  bas-reliefs identifient les salles de bain privées de Madame et Monsieur Reinach.
La personnalité des habitants des lieux est traduite par la décoration :

La tonalité bleue des fresques murales et la  rigueur sobre  du mobilier caractérise l'univers de la maîtresse de maison:

 

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 Le domaine privé de Théodore Reinach  apparaît bien différent:  Une chambre très claire, éclairée sur trois côtés , réchauffée par le rouge dominant des murs.  

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À ces choix décoratifs personnalisés s'ajoute un raffinement de détails permettant de juxtaposer discrètement les pratiques  modernes du confort au style de référence:

PICT0121.JPGdes éclairages subtilement évocateurs

 

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aux robinets des installations sanitaires.

 

 



 Passant par L' Andron, salon réservé aux réunions entre hommes, et la bibliothèque, vous relèverez certainement une ambiance propice à la méditation et la réflexion.

 

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L'andron donne à droite sur le péristyle

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Au fond, derrière les deux colonnes, la bibliothèque, ce qui suggère, n'est-ce pas mes soeurs, que l'accès est plutôt réservé …

 

 

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Au delà de la conception de cette Villa peu ordinaire, et pour tout dire, le visiteur lambda peine sans doute un peu à se projeter dans son schéma habituel, l'intérêt des objets collectionnés et présentés en situation est saisissant. Je ne peux abonder en clichés, mais je vous livre quelques exemples d'objets ou de la statuaire :

 

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  bronze Faune

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Léda , terre cuite

 

 

Une visite d'une telle richesse ne saurait s'achever sans mentionner les jardins.

 

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Au mileu des plates-bandes d'arbustes typiquement méditérranéens, nous contournons la bâtisse pour découvrir  la galerie des statues, situés en contre-bas , au niveau de la mer.

Au raz des flots, les reproductions les plus élégantes et les plus représentatives de l'Art Sculptural nous attendent. Au long de cette galerie circulaire, de nombreux panneaux exposent l'expansion du monde grec par la mer, l'importance et la stratégie portuaire sur le pourtour méditérranéen, la compréhension d'une circum navigation au fil des mythes et de la réalité économique d'une civilisation qui ne pourra jamais mourir tout à fait…

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08/11/2009

Théâtre à Saint Max

 

Il n’y a pas que Ducros qui se décarcasse…
Les petites villes se démènent pour offrir à leurs concitoyens des moments de détente variés.
Côté culture, Saint Max joue des pieds et des mains. Notre petite commune de plus de 13 000 habitants dispose de cinq écoles primaires, deux collèges publics, un lycée public depuis 2 rentrées, et un lycée privé professionnel qui a offert une formation à de nombreux élèves du Canton.

La vie associative y est également remarquablement développée : une bonne centaine  d'associations répartissent leurs efforts sur les multiples secteurs de la vie communautaire : des anciens combattants aux clubs sportifs, culturels, entr’aide sociale,  parents d’élèves et  comité de jumelage. Chorale, bibliothèque et culture font bon ménage, et le forum de septembre offre de nombreux loisirs à qui veut bien s'en donner la peine.

Mais la municipalité n’est pas en reste pour offrir du divertissement.
Hier soir notamment, elle avait programmée une représentation théâtrale. Plutôt que de s’offrir une énième soirée télé,  nous avons décidé de descendre en ville frotter nos postérieurs à la rudesse des chaises métalliques de la salle des fêtes…. 

La pièce annoncée  , Moi, mon mari, mes emmerdes, a du être remplacée au dernier moment par un programme impromptu, servi par deux comédiens, Philippe Urbain et Emmanuel Carlier, seuls en scène dans un décor de paillotes et de détritus de chantier. Des éclairages rutilants, une bande son assez tonitruante, le confort minimaliste offert aux rangées de spectateurs, nous voilà bien loin des ambiances de spectacle  conventionnelles dans les grandes cités. Ce serait presque ambiance kermesse, mais le public est au rendez-vous. Malgré le changement de dernière minute, la salle est pleine et c’est tant mieux, car les deux comédiens qui se démènent sur la scène méritent amplement l’écho des rires qui fusent d’entrée de jeux.

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La pièce jouée, vacancesdemerde.com, a été écrite par nos deux acolytes, et les compères trouvent même l’astuce d’impliquer les Maximinois par leurs répliques taquines au cours de leurs prestes échanges. Évidemment, le public, bon enfant, réagit dans le sens espéré, et le dialogue entre la salle  et la scène devient chaleureux. Du coup, les  joueurs ne se retiennent plus et leur comédie connaît un succès mérité. À force de jeux de mots rebondissants et  de situations absurdes, le comique de situation se révèle efficace…nous sommes tous gorges déployées à oublier les menues misères et les soucis de nos existences ordinaires, une heure et demi durant. Pas de casse-tête intello déprimant en ce samedi soir de novembre, pluvieux et frisquet, et à la sortie du spectacle, l’assistance familiale témoigne de cette ambiance conviviale et chaleureuse.

De plus amples renseignements sur le spectacle présenté
http://www.l-affiche.com/page_artiste_spectacle.asp?rec=355

03/02/2009

Lynda Lemay

Samedi soir,  c'était  encore Noël.

En compagnie de  Simone,  nous sommes allés à Marseille assister au concert de Lynda Lemay.

Si vous suivez un peu mes notes, vous n'avez pas été sans remarquer que j'éprouve  une  réelle admiration pour la demoiselle et son merveilleux franc-parler, sa faconde et sa spontanéité.  Mais c'était la première fois que nous assistions  en chair et en os, à un concert de l'Artiste. Et comme dirait la Ravie:

- C'est quand même mieux dans la vraie vie!.

- Et en plus, ajoute GéO, "qu'est-ce qu'elle est belle!"

Il est saisissant de constater combien son énergie est communicative. Le public lui est manifestement tout acquis, la salle du palais des Congrès pleine à craquer, les applaudissements généreux , en réponse à la fougue de notre troubadour, non pas en jupon, mais chat-bottée de cuissardes,  auréolée du voile de ses cheveux, déversant sa verve mélodieuse dans nos tympans.…Jusqu'à la limite de l'assourdissement. On peut noter  en effet une toute petite fausse note dans le réglage de la sonorisation, qui nuit parfois  à la clarté des paroles . Vous avouerez que c'est dommage, s'agissant d'une diseuse de textes tellement concis et imagés.

Lynda présente son dernier album, Allo c'est moi, mais nous avons retrouvé avec grand plaisir les titres qui ont forgé son univers,  de la mésaventure amoureuse illustrée par les inénarrables souliers verts aux abysses de la  tragédie traduite par Les Canards, que je ne peux écouter sans avoir mal aux tripes. Les nouveaux titres ne déparent pas cette galerie d'humanité, avec Juste un bébé, dont le regret flétrit cette femme vieillissante, trop vertueuse et trop raisonnable, la faiblesse amoureuse  ( Depuis tes doigts sur moi) , l'Amitié qui vaut amour       ( Mon Gérard), le lyrisme poétique du portrait  Bleu dessiné pour son pays, sans omettre le miroir de la dérision par lequel elle dépeint l'éternel des relations féminines/masculines: écoutez  le dard pour retrouver le piquant de la nature humaine, version humour et causticité, clin d'oeil aux bandes de dégonflées /dégonflantes des Lettres rouges. Inoubliable, bien sûr!

Si d'aventure vous repérez le passage de Lynda  Lemay dans votre sphère, n'hésitez surtout pas , elle vous accueillera comme si vous osiez lui rendre  visite, quoiqu'elle  prétende, elle vous servira en guise de petits gâteaux  son humour et sa tendresse, charme et sarcasme mêlés, un vrai Grand Moment à partager sans modération.

 

26/01/2009

Ça coule de source…

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Le renouvellement des générations apporte fraîcheur et dynamisme à nos esprits formatés.
Sandrine a eu la gentillesse de m’adresser cette petite gourmandise, assortie des progrès culinaires de la petite dernière, Anaïs, dont vous n’avez peut-être pas oublié le sens du partage avec Copain, l’été dernier, anecdote filmée par une indiscrète caméra.
Pendant qu’Anaïs s’exerce en cuisine avec rigueur et enthousiasme, Mathis enrichit sa culture historique et développe sa pensée philosophique, au cours d’une conversation entre hommes…

- Papa : "Avant, il y a très longtemps, ce sont les rois qui habitaient les châteaux. Mais ce n'est plus le cas aujourd'hui."
- Mathis : "Pourquoi ?"
- Papa : "Tu sais, ils n'ont pas toujours eu de la chance"
- Mathis (4 ans et demi) : "Pourquoi, parce qu'ils n'ont pas eu la fève ?"

Je vous le disais, ça coule de source, il suffit de conserver l’ angle de vue adéquat…

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Conscience professionnelle, il faut payer de sa personne et ne pas servir n'importe quoi…

15/12/2008

La relève

Ce tout petit billet du soir pour souligner qu’un talent réel se signale quand il peut toucher tout le monde, et que la reconnaissance d’un talent ne tient pas qu’à la promotion convenue des milieux branchés.

J’ai écouté le slam d’un chouchou actuel des radios, et j’ai plaisir à reconnaître l’émotion qui m’a saisie en entendant ces mots--là, lyriquement orchestrés par sa voix aux sonorités claires et profondes.

Il chantait comme Jacques Brel, quand le poète parlait de ces gens-là ou des chagrins de Jeff.
Il m’a semblé alors entendre à nouveau cet accent universel qui est une véritable expression artistique. Et puis un peu par hasard puisque je ne suis pas vraiment fan des émissions variétés, à la télévision, je l’ai vu, cet homme magnifique, au regard direct, aux traits de Prince Éthiopien, ce qu’il n’est pas, mais il m’a paru si beau ce tout jeune homme, qu’il en a la noblesse telle qu’on l’imagine à la lecture de Pierre Loti.

Alors, évidemment, je me suis renseignée : Abd Al-Malik n’est pas un débutant, il sort déjà son troisième album et n’a pas besoin de mes gouttes d’O pour assurer son succès. Mais il me plaît de saluer le talent de la relève et dire mon plaisir à constater que toujours quelque chose émerge, la Création est une force vive à toutes les époques, les contextes les plus divers peuvent être source de créativité, d’inventivité. Tant qu’il y aura des talents variés pour dire la Vie, la chanter ou la danser, transmettre les émotions et les espoirs, la civilisation n’est pas fichue.
Écouter Abd Al-Malik impulser tant de forces vives à ses contemporains, « Ça c’est du lourd » !

Un autre jeune homme, à la poésie plus douce, plus taquine, plus tendre, ce qui n’exclut pas une pointe d’ironie pour piment de ses rimes, c’est Renan Luce. À suivre et à écouter avec attention, celui-là aussi, même si GéO relègue dans le même sac les « susurreurs » de mots tranquilles. À nous, « les vieux de la feuille », de lutter contre la tentation de remiser les jeunes talents dans un agglomérat inconsistant, comme si seuls les souvenirs de nos jeunes années valaient la compagnie de nos retraites douillettes. Il y a dans le renouveau des jeunes talents plus d’inventivité et d’humanisme que dans les rengaines éclusées des vingt années révolues. Franchement, quoi de plus tarte que les chansons des années 80?

Un jour, je vous parlerai aussi des émois que je dois à Lynda Lemay. La force de ses chansons qui résonnent comme autant de Nouvelles fortes où elle témoigne de mille vies vécues, de déchirures si tragiques, en corollaire d’un regard renouvelé par son humour corrosif. Je suis amoureuse de ses expressions si neuves qui accompagnent et allègent mes sempiternelles corvées ménagères que toute femme est censée accomplir naturellement, simplement parce que le sort (et surtout le poids des traditions qui arrangent bien nos hommes, hélas !) ) l’a dotée du syndrome VMLR, le gène Vaisselle-Ménage-Lessive-Repassage. Et je souhaite tant que nos filles y échappent, à écouter la relève, il me semble parfois que ce doux rêve progresse…à pas comptés.

11/03/2008

Improbables hasards de nos lectures

À propos de L’ombre du vent
de Carlos Ruiz Zafon qui est un roman encore récent, puisqu'il date seulement de cette décenie, j'ai envie de vous faire partager une petite digression.

Cette fois, je dois bien avouer que je n’avais jusqu’alors jamais entendu le nom de cet auteur et à ma grande honte, j’ai dû ainsi prendre conscience de l’indigence extrême de mon approche de la littérature hispanique. Les derniers romans de ma brève culture date de mon époque « censier, Sorbonne nouvelle Paris III» UV de littérature comparée. Je m’étais alors régalée de la découverte du splendide Vaste est le monde de Ciro Alegria (Gallimard nrf) , ouvrage prolifique et marquant que je n’ai jamais oublié, alors même que je l’ai très parcimonieusement prêté. D’ailleurs les rares lecteurs auxquels je l’ai confié n’ont pas paru en percevoir le suc dont j’avais conservé le souvenir, et du coup, je l’ai peu diffusé.

Et bien en fait, si mon livre à adopter, à sauver n’était autre que celui-ci ?

En exhumant Vaste est le monde de ma bibliothèque pour qu’il m’accompagne dans la rédaction de cette note, je me sens émue et compatissante en regard de son état : sa couverture jaune racornie, son dos scotché sur les deux angles, une barre d’adhésif renforçant la couverture d’une large diagonale, mon livre porte la marque de l’intérêt qu’il a suscité dans les années 70. J’ouvre précautionneusement la couverture, et tombe sur un minuscule encart proprement découpé dans un journal de l’époque, scotché sur la page de garde. À la main, j’ai simplement reporté à l’encre rouge la date : 22 avril 1970. Intitulé Un convoi d’esclaves est intercepté par la police, l’article mérite d’être recopié ici, vous allez en juger :

« Recife (AFP., UPI) La police de l’état de Pernambouc a libéré, mardi, deux cent dix paysans destinés à êtres vendus, dix-huit dollars chacun, à des propriétaires ruraux de l’état de Minas-Gerais.
Les paysans, originaires des États de Paraïba et de Rio Grande do Rio Grande Do Norte étaient transportés par des camions. L’organisateur de ce trafic d’esclaves a réussi à s’enfuir. Au début de ce mois, les autorités avaient déjà arrêté à Recife les dirigeants d’un réseau analogue, qui vendaient des paysans aux grands propriétaires du centre et du sud du brésil. »


C’est bref, vous en conviendrez, et l’épisode est totalement oublié. Pourtant, cet article n’est probablement pas là par hasard… Que d’émotions, de révoltes, de prise à parti me reviennent d’un coup en mémoire. Ce livre à-ne-pas-oublier me renvoie tout à coup à ma propre perte de cohérence, mon inconstance en quelque sorte…
Vaste est le monde, immense est l’enterrement inconstant de nos idéaux…

Traduit en français par Maurice Serrat et Michel Ferté, dans la collection la croix du sud en 1960, l’épais roman de Ciro Alegria relate un long épisode de la conquête des terres péruviennes par les Hacendados, propriétaires terriens qui achètent à bas prix grâce à des collusions politiques, les terres que cultivent en communautés des paysans dépourvus de tout. Vaste fresque humaine, composée de personnages attachants et émouvants par leur dignité et leur simplicité, ce fut pour moi l’ouverture sur une page d’histoire inconnue. Or les faits relatés dans le récit et sur ce petit article découpé sont autant de témoignages d’une situation qui perdure, je me souviens avoir lu durant l’été 2006, je crois, un dossier sérieux constitué sur cet état de fait au Brésil du cher Lulla. L’ouvrage de Ciro Alegria est donc toujours d’actualité, preuve s’il en est que l’artiste-écrivain traverse les âges et les époques et que son œuvre doit nous aider à nous tenir debout , vigilant et attentif.

Ce retour aux sources inattendu, cette madeleine littéraire qui provoque un téléscopage passé-présent, j’imagine sans peine que je ne suis pas seule à l’avoir expérimenté ce soir… Expérience à partager et à faire partager…

04/03/2008

Du Rire tout simplement chez les Ch'tis

Comme beaucoup de Français, nous nous sommes offert hier soir un p'tiot coup de rire. Sans prétentions, juste idée de se détendre . Et nous avons passé un bon moment de franche hilarité au 1er degré, sans arrière pensée ni méchanceté, au milieu d'un public aixois ausi décomplexé que nous par les gags basiques mais efficaces. Il ne s'agit pas de se prendre la tête, d'affecter le regret d'un manque de profondeur du scénario, foin des poses intello, on s'adonne ici au même rire convivial que pendant la projection de la Grande Vadrouille.….
Cette comparaison qui vient spontanément sous mon clavier n'est pas anodine, car il y a chez Dany Boon quelque chose qui n'est pas sans rappeler le talent de Bourvil. Un franc regard bleu, mélancolique et bon coeur, une apparence de naïveté qui cache sans doute un talent bien plus profond… Ce n'est qu'une intuition, mais je demande à voir la suite de la carrière de ce monsieur.

Le film semble promis à une carrière fructueuse et c'est tant mieux. Bien sûr, l'intrigue est mince et repose essentiellement sur le comique de situation, l'éternel paradoxe des personnages qui endossent des conjonctures dont ils ne veulent pas. L'inadaptation et l'incongruité en sont les ressorts, assortis d'une surprise et d'une revanche qui pâment de réjouissance les spectateurs: enfin, il n'est plus question que de magnifier cette belle Provence que cinéma et littérature ont déjà copieusement servie! L'idée est de donner une aura à une région bien moins connue et de mettre à l'honneur un parler savoureux quoiqu' ignoré voire méprisé parfois. Dany Boon en fait un ressort comique et joue de l'ambiguïté et de la surprise (oh les jeux de mots !), on peut pressentir que certaines répliques vont accéder sans tarder au régime "culte" d'ici peu… Il me semble que ce qui m'a le plus réjoui finalement, c'est la convivialité dépeinte et je pense que le public aixois y a été bien sensible aussi…Pourtant, nous vivons dans une région où cette qualité n'a guère cour: que l'immigrant parisien reçu pour un simple café par un Provençal d'origine lève le doigt! Quelle leçon, mazette!