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11/02/2015

L'Hôtel New Hampshire

 Ouvrir un roman  de John Irving,   c’est toujours l’assurance de plonger dans un monde fourmillant, tragi-comique, où le burlesque côtoie le drame, où les sentiments des personnages ne seront jamais sordides et mesquins, où se croiseront des personnalités polymorphes mises en scène habilement. John Irving possède le talent de dresser un portrait caustique de la société américaine au mitan du vingtième siècle, et de retourner la  violence de la satire par de soudaines pirouettes, versant  au registre clownesque les frasques et les humeurs de ses protagonistes et nous régalant de diverses facéties. Bref, écrit en 1980, l’hôtel New Hampshire s’inscrit bien dans la veine du Monde selon Garp, pour  les lecteurs qui ont déjà fréquenté l’univers d’Irving.  

Le narrateur de ce présent ouvrage s’appelle John, comme l’auteur. Il est le troisième d’une fratrie de cinq enfants, conçus par le couple de Winslow Berry, fils de Robert Berry dit Coach Bob, et Mary Bates, tous deux enracinés à Dairy, petite ville sans avenir  du fin fond du New Hampshire. Le ton particulier de cette saga familiale nous réjouit d’entrée :

« Notre histoire favorite concernait l’idylle entre mon père et ma mère : comment notre père avait fait l’acquisition de l’ours, comment notre père et notre mère s’étaient retrouvés amoureux, et, coup sur coup, avaient engendré Franck, Franny et moi-même                       (« Pan, Pan, Pan », disait Franny) ; puis, après un bref  intermède, Lilly et Egg (Paf et Pschitt ! » disait Franny).  (  Page 10 de l’édition Points)

L’histoire de l’Hôtel New Hampshire se décline en trois grands épisodes, trois états différents du même rêve, l’utopie de Win Berry qui embarque sa famille dans l’hôtel conçu comme une arche de Noé. Et comme toute navigation est hasardeuse, la famille Berry traverse son lot de catastrophes,   surmontées vaille que vaille grâce à une curieuse solidarité familiale, stimulée par la force morale de Franny, qui exerce un rôle de leader incontesté. Car s’il y a deux filles pour trois garçons dans cette fratrie, ce sont les femmes ici qui incarnent le réalisme et la volonté d’avancer, Franny d’abord, puis la petite Lilly qui essaie toujours de grandir. De fait,   chaque personnage cherche  sa place et son identité, ce qui confère au roman une dimension attachante qui dépasse les aspects brillants du récit. 

Et cette histoire d’ours, me direz-vous ? Les ours et le chien Sorrow sont membres à part entière de cet échantillon d’humanité.  Curieuse métaphore  que file l’auteur, tout au long du roman : D’abord State O’ Maine, transmis par l’ami Freud, (  un homonyme du fondateur de la psychanalyse),   ours un peu psychotique quand même, dont les frasques provoquent maintes aventures… Et prédispose le chien à s’appeler Sorrow, le chagrin. On ne s’étonne même plus alors de l’aphorisme résultant : le chagrin flotte, vous verrez pourquoi…Mais quand l’Ours Susie entre en scène, nul ne peut prévenir la suite des catastrophes qui s’enchaînent. La famille émigre à Vienne, en  Autriche, pour recommencer un nouvel hôtel New Hampshire, entendez un nouvel état des choses. À la manière d’un nouveau Candide, le narrateur souligne l’abîme infranchissable qui s’étend entre le monde réel et la micro-société familiale ancrée dans son image.   Tu sais, me disait parfois Fehlgeburt, l’unique ingrédient, qui distingue la littérature américaine des autres littératures de notre époque est une sorte d’optimisme béat et illogique. Quelque chose de techniquement très sophistiqué sans cesser pour autant d’être idéologiquement naïf…(Pages 394-395)

 Retrouver l’Amérique, c’est se prouver que l’on a évolué, grandi comme Lilly, en intégrant ses deuils. Au cours d’une grande scène typiquement « Irvingnienne », Franny affronte son violeur,   comme  chaque membre de la famille règle son destin. Dans le dernier Hôtel New Hampshire, Win Berry, à l’abri de sa cécité, poursuit son rêve de bonheur, ses enfants ont pris l’avenir en main.

 

John Irving, hôtel new Hampshire, littérature américaine

 

L’Hôtel New Hampshire

John Irving

Points (seuil)  1995

 1e édition US 1981

Traduction Maurice Rambaud

ISBN :2-02-025586-3

20/09/2014

Entre nos mains

Mains qui prient  et  pansent nos manques… Mains dispensant les gestes attendus,  mains fortes jamais inertes, mains tendues, mains jointes pour mieux enserrer nos pensées. Mains ouvertes sur le jardin des amitiés… Merci à Alice et à  Anne-Marie pour cette magnifique journée partagée

musée Rodin, amitié,

25/06/2014

Les chats de Naxos

Notre façon de   voyager livre sur l' explorateur  moderne plus d’indiscrétions  qu’il y paraît.  À l’abri de nos  objectifs, nous happons à foison morceaux de paysages tronqués par le cadrage, vestiges  de civilisation figés par l’érosion, scènes de vie séquencées par le rythme de nos circuits. Le touriste actuel est un courant d’air qui,   tel un  nuage,   traverse l’horizon des contrées visitées. Il n’y laissera rien d’autre qu’une ombre fugace, estompée  sitôt qu’il tourne les talons.  Les habitants des sites envahis avec constance par les vagues successives de globe-trotters saisonniers ont mis au point des tactiques de Résistance, indifférente ou servile, hostile ou débonnaire,   fuyante ou accueillante. 

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                                         coucher de soleil sur Ios

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                                                                                              Santorin 

Cette semaine passée à bord de L’Aegeotissa nous   a bercés d’une bienveillance revigorante. Sous l’égide  dynamique et maternelle de Maria,   les îles abordées ont livré leurs senteurs d’été et la blancheur des maisons, les ruelles labyrinthiques des villes, les paysages alternativement dénudés et touffus, la fraîcheur des eucalyptus et  la luxuriance des bougainvillées…    

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Lefke la verdoyante                              

 

                                                      Naxos

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Quand notre timing ne coïncide plus avec la permanence d’une Nature hiératique, nous pouvons ressentir la frustration du manque de temps nécessaire à la pérennité de la connaissance, à l’installation lente et progressive des liens humains — il faut du temps pour s’apprivoiser disait le Renard au Petit Prince—   nous sommes tentés d’accaparer le caractère "authentique" de cette vie offerte à nos regards. La technologie le permet, un zoom rapide au détour d’une   venelle  peut saisir  un couple de vieillards prenant le frais sur leur seuil. Mais au-delà du cliché pittoresque, quelque chose nous retient, et  empêche la violation d’une intimité  qui ne nous appartient pas.

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Alors, alors me direz-vous, comment conserver précieusement la chaleur bienfaisante des ressentis, ce bonheur tangible de toucher par nos cinq sens la vraie vie qui nourrit l’humanité ? Le partage  généreux des rires et des  conversations échangées d’un bord à l’autre d’une rue, d’un quai, d’une sente ?

En réalité, ce sont eux qui nous ont encouragés à les regarder, à les admirer…À les photographier.

Eux vivent partout, ils se croisent de bon matin ou à la lumière du couchant, ils ne fuient pas la chaleur aride du Zénith. Ils se laissent approcher, attendent patiemment que vous portiez vos pas jusqu’à les caresser. Confiants dans l’objectivité de l’appareil, ils prennent la pause. Ils occupent le terrain comme nos pensées, ils sont les témoins du temps qui ne passe pas, d’une éternité que les hommes ont besoin de sculpter dans la pierre mais qu’eux seuls savent transmettre. Ce sont les Chats de Naxos, Santorin ou Mykonos. Ce sont les Chats des Îles, qui se moquent bien de notre curiosité passagère. Depuis que la colère des Géants  a jeté leurs rochers sur l’immensité de la mer, ils ont vu passer tant de passion, de vaillance, de volonté de survivre qu’ils ne craignent plus  ni tempête ni  guerre, pas même qu’une virago les chasse du foyer :  C’est à nous, piétons intrusifs, qu’il appartient de respecter l’espace qu’ils nous consentent.

 

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10/06/2014

Le collier rouge

Le collier rouge

Jean-Christophe Rufin

Gallimard (NRF) 2014

ISBN :978-2-07-013797-8

 

Avec ce roman, qui pourrait paraître court, Jean Christophe Ruffin revient à la fiction. En réalité, malgré la limpidité de son écriture, le sujet traité ici est dense. Si l’on peut se méfier de l’effet tendance qui consiste à projeter les intrigues sur le centenaire de  la déclaration de la première guerre mondiale,  Jean Christophe Rufin nous entraîne très vite à la recherche de la Vérité, celle qui ne s’expose pas aux regards de témoins omniscients mais qui motive profondément certains actes aussi impulsifs qu’insensés. Cette quête universelle et intemporelle est menée ici par le juge militaire Hugues Lantier du Grez , qui entend résoudre sa dernière affaire en tant qu’officier, avant de réintégrer la vie civile. C’est dire que sa conscience professionnelle est composée de rigueur et de respect des valeurs de sa classe, autant que d’une lassitude morale, maladie contractée à force d’examiner  les  dossiers de pauvres diables ayant subi l’enfer des tranchées pendant quatre longues années.

Au cours de l’été 1919, le Commandant Lantier  débarque  donc dans une petite bourgade berrichonne endormie sous la chaleur. Seuls les aboiements  désespérés d’un chien perturbent la léthargie de la petite ville. À l’intérieur de la caserne désaffectée, un gardien veille l’unique prisonnier du lieu. Cet homme mutique doit répondre d’une agression inexplicable dont la nature ne nous sera révélée que bien plus tard. Mais la  curiosité du juge militaire concerne le curieux rapports établis entre Morlac, ce paysan taiseux revenu dans sa région, et son chien manifestant une fidélité exemplaire. Pourquoi  et comment cet animal, devenu  tout au long du conflit la mascotte des bataillons où son maître était  envoyé, a-t-il pu susciter sa haine?  Pourquoi cet homme est-il revenu de son propre chef dans son village, en évitant de rentrer chez lui, de retrouver sa ferme, de se jeter dans les bras de sa femme et de son fils ?

Menée comme une intrigue policière, la recherche des motifs de l’étrange comportement du prisonnier met l’accent sur les difficultés de réinsertion de ces hommes traumatisés par leur vécu. Rufin ne joue pas la carte du misérabilisme ni de la culpabilité sociale et politique, mais laisse  percevoir  à travers l’obstination du juge, combien il devient nécessaire de gratter délicatement les défenses acquises  par ces hommes qui ont compris qu’ils avaient été floués, qu ’on avait joué de leurs vies et de leurs sorts pour servir des intérêts abscons.

Rufin nous offre un étonnant argumentaire du juge, qui propose à l’homme d’abandonner les charges, ce que l’accusé récuse. Il n’entend pas se dérober à la sentence qu’il croit mériter.   Car le commandant découvre peu à peu que l’accusé n’est pas le paysan analphabète qu’il avait cru devoir juger. Et puis ce chien qui se tient obstinément aux abords de la place, qui meurt de faim, de soif et d’épuisement malgré les soins empathiques de certains villageois, ce fidèle compagnon devient un personnage à part entière et Lantier devine que le canidé détient la clé de l’affaire. Finalement, après bien des détours autour du personnage, c’est au long d’une  enquête « à la Maigret », reposant sur les menues confidences recueillies dans le village, que l’officier parvient à saisir qui est Morlac, et quels sont les vraies raisons de ses agissements. Le lecteur n’attend pas de Jean-Christophe Rufin une autre vision que celle d’un humaniste. Et ce sera la toute dernière joute reposant  la sentence  qu’il confie à son juge. «  En tous cas, conclut Lantier d’une voix ferme, je ne serai pas complice de votre provocation. Puisqu’on attend de moi que je vous punisse, je sais quel châtiment je vais vous infliger. C’est celui qui fera le plus de mal à votre orgueil. Vous allez la voir et l’entendre. L’entendre jusqu’au bout et mesurer votre erreur. «   (page 149)

Un beau roman humaniste et touchant,  un de ceux que l’on regrette de refermer, et qui ne pèsera pas lourd dans vos bagages de l’été.

 

 

roman, écriture, note de lecture, Jean Christophe rufin

 

10/03/2014

Mal-entendu

Par la grâce du clavier,  partageons ce sketch de notre  humoriste maison…

Donc ce matin je me lave les dents tranquillement dans la salle de bain quand Mathis entre. 
Il me regarde attentivement et me dit: "Maman pourquoi tu te laves les dents?".
Je réponds " pour qu'elles choient propres". 
— Han! tu laves la langue aussi? pourquoi tu laves la langue??? 
— Pour laver les jodeurs de la nuit...shhhh (aspiration du dentifrice qui fuit).
— Pour laver les odeurs de l'anus maman? c'est quoi l'anus?" 
— NON! pour laver les odeurs de la nuit! shhh 
— Mais c'est quoi l'anus!"
— Mathis, la nuit!" 
— L'anus c'est la nuit?" 
Et voilà comment un enfant de 3 ans 1/2 annonce fièrement à sa maîtresse le matin que sa maman se lave les dents pour laver l'odeur de l'anus... :)
Bonne journée!

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19/02/2014

Artiste en herbe

 Vous prendrez bien une petite goutte de jouvence?

 Celle-ci par exemple,  distillée telle que je l'ai reçue en ouvrant ma boîte mail . 

Petite anecdote du jour :

        Ce matin en m’habillant, je constate,consternée,  quelques gribouillages sur les murs de notre chambre, derrière le lit. J’interpelle Mathis qui sautille gaiement sur ledit lit :

—   Dis-donc Mathis, c’est quoi çà !? 

—   Ben c’est un rond et un escargot .

—   Mais enfin, qu’est- ce qui t’a pris de dessiner sur le mur ?

—   Ben petit ours brun lui,  il a fait de la peinture sur le mur …

        Mathis, pas si attentitf que çà pendant les histoires, aurait pu se rappeler que Maman Ours se fâche à la page suivante, parce que c’est une bêtise de dessiner sur les murs… 

  Au moins peut-on constater un net progrès en art plastique….

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11/01/2014

Question de point de vue

     8h15, en ce jeudi matin de début Janvier. Accompagné de sa Maman et de la petite soeur dans  la rue  qui mène à l'école,Mathis trottine gaillardement.  Au milieu du trajet de quelques deux cents mètres, notre écolier s'arrête brusquement  et déclare:

— Pffou! J'ai déjà eu une longue journée! Je crois que je vais faire une petite pause…

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26/08/2013

Des Rabastitouilles dans mon sacpoche…

À l’heure où nos esprits se laissent happer par  la rentrée, prêts à oublier que l’été  court encore  quelques semaines — dans ma contrée à tout le moins — il est bon de commencer la collection des souvenirs estivaux. Je n’oublierai pas de loger dans mon « sacpoche » la réminiscence délicieuse des moments partagés,   pépites merveilleuses qui d’années en années constituent l’essence de nos sentiments d’exister.

D'autant que certaine situation constitue une perle rare qu'il convient de préserver:

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Familles et amis, nos cercles intimes et familiers, nos rencontres nouvelles, la douceur de vivre un soir sans fin sous les étoiles, l’éblouissement des matins lumineux et déjà chauds aux côtés de Mathis, les visites de nos jeunes que leur épanouissement pare de toutes les promesses … 

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Il y a eu moins de monde cet été dans notre royaume, mais chacune des visites a été vécue intensément et chaleureusement.  Il y eut beaucoup de bonne humeur, même quand Mathis s’est interrogé sur la valeur des « rabastitouilles » de Papyrache : fallait-il s’émouvoir vraiment des sempiternelles promesses de fessées et autres gracieusetés dispensées ? Philosophe, l’enfant a résolu la question : la vie est faite de diversité, chaque adulte a sa place, chaque caractère a sa fonction, pour preuve, moins de 5 minutes ont été nécessaires pour adopter Papy Pierre…

 

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Quant aux promesses de manger tout seul, comme un grand… Soit, mais à condition que le poisson soit mieux épluché   -— Non, là, j’ai un trait dans la bouche !— dans tous les cas, un petit coup de main ne se refuse pas…

 

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