Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/02/2013

Waddine, ou la pratique du conte

           

conte, littérature ado,  intrusion du  merveilleux dans le récit, Serge Casoetto,

            Toutes nos lectures sont autant de rencontres, portes ouvertes sur des univers différents et spécifiques. Le hasard dépose parfois de minuscules balises  sur nos chemins, jalons convergents vers des horizons insoupçonnés, des  trouvailles insolites ou évidentes, des liens tissés à notre insu. Quelquefois l’aventure reste sans lendemain, mais il arrive qu’elle creuse son nid, flâne dans notre inconscient et  finisse par émerger un beau jour  sous une forme inattendue, île au trésor posée sur l’océan de nos imaginaires.

Cette remarque est doublement vraie.

D’abord, elle peut résumer ma rencontre avec l’auteur du conte que ma note souhaite vous inciter à découvrir. Mais cela, mes souris fidèles et discrètes, je vous en soufflerais peut-être quelques mots en d’autres occasions.

Pour l’heure, que vous cherchiez un conte pour enfant ou une fantaisie pour égayer un soir d’hiver un brin  morose, partez avec moi dans l’univers d’un prince des mots,   d’un magicien intemporel, d’un souffleur d’enchantements… 

Waddine est à l’origine le nom  d’un personnage imaginaire, mais à l’existence réelle, même si sa présence est restée occulte… Waddine était le compagnon secret d’un petit garçon à l’âme solitaire, il faut croire.  Pour ma part, après avoir lu le conte écrit par Serge Casoetto,    j’ai acquis une autre perception de cette transposition : il se pourrait que l’auteur ait un don de voir ce que nous autres, pauvres mortels, sommes incapables de reconnaître.

 

 En pénétrant dans l’univers de Waddine, le conte, nous arrivons d’abord à  Lamina, un village de montagne reculé et intemporel où parvient un beau jour un personnage sans attache ni référence, dont beaucoup commencent  à se méfier, comme il est de mise dans les campagnes.

« En réalité, Waddine parle peu. Il arrive rarement qu’il prononce même un seul mot durant ces visites nocturnes. Le timbre de sa voix est comme celui des sirènes. Il s’évanouit au gré des vagues et du vent.… » ( Page 19)

Or le bel inconnu se joue des défiances.  Waddine semble posséder un atout inné, un pouvoir de séduction  qui s’exerce naturellement sur les différents membres de cette communauté, où habitent comme partout des personnes fort dissemblables.

Dans une langue colorée et parsemée d’images poétiques,    Serge Casoetto présente peu à peu  les  habitants de Lamina. Car, si les villageois lui ouvrent leur coeur, nul ne parvient à connaître vraiment l’étranger qui s’est installé dans une misérable remise à l’écart du village.

Cependant   un  drame éclate et Gordjaev, chef d’une petite bande de gamins dépassés par leur propre jeu, se retrouve confronté à une terrible responsabilité. Un terrible enchaînement de violence, que l’auteur évoque en scènes saisissantes.

« Dans la rue silencieuse, Gordjaev est resté seul. Il s’approche lentement du corps de Samuel, étendu contre le trottoir. La pierre l’a atteint en pleine tempe. Incrédules, les yeux bleus de l’enfant contemplent le ciel et la cime des verts peupliers. Gordjaev se sent profondément seul. Le petit Russe s’écroule en pleurs sur le cadavre de celui qu’il voulait châtier. Puis, relevant la tête en hoquetant, Gordjaev le fier aperçoit à travers ses yeux obstrués de larmes une silhouette descendre la  petite rue. Il la reconnaît. La longue cape noire efface l’habit blanc de lumière. Waddine s’arrête aux pieds de Samuel, mais ses yeux ne regardent que Gordjaev. Et Gordjaev ne voit plus que Waddine. Alors, Gordjaev Yemkov se lève. Il paraît implorer en une soumission la clémence du pèlerin. » (Page 29)

 

Ce paragraphe me paraît particulièrement explicite de l’intrusion du merveilleux dans une histoire humaine.  Si  le lecteur ne peut déceler  immédiatement la quête qui se dessine dès ce moment, il se posera sans doute des questions: Quel est le sens de cette indifférence apparente envers la victime ? La première partie du conte ancre l’histoire et les personnages dans un monde réel où le merveilleux est implicitement distillé pour créer chez le lecteur ce chatouillement d’hésitation qui nous surprend au moment de franchir un passage défendu.

Les réponses se dessineront progressivement, au terme de multiples péripéties vécues par d’étranges personnages convergeant vers… Un lieu secret, île paradisiaque ou repaire bien gardé ? Je me garderais de développer plus avant les étapes et  les portraits de ces nouveaux protagonistes,   il suffit de les accompagner au long de leur quête, voyage fantastique entre deux mondes, où Serge Casoetto ménage de multiples clins d’œil: à la  mythologie et à  l’Histoire antique,   certains personnages portent des patronymes  évocateurs,   Nabuchodonosor, Mnémosyne, Sémiramis… Mais aussi Mac Luke ou Gomina, manière humoristique de refuser de s’enfermer dans un genre  trop codifié.

Naturellement, ce conte original s’adresse d’abord à de jeunes  lecteurs prêts à s’affranchir de l’enfance, qui sauront s’amuser dans le dédale des mondes juxtaposés.  En tant que lectrice  adulte je me suis rafraîchi l’esprit en m’immergeant dans un univers  simplement merveilleux qui, sous son aspect ingénu, offre une belle matière de réfléchir à l’authenticité et la sincérité de nos valeurs.

 

Waddine

Serge Casoetto

Tous les renseignements pour se procurer l'ouvrage, et bien d'autres oeuvres du même auteur, sont détaillés sur le site de Serge casoetto:

http://www.serge-casoetto.com/

  

Les commentaires sont fermés.