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08/02/2014

Un air de folie…

Parmi la foule qui envahit le foyer de l’opéra de Marseille, ce mardi 4 février, nous remarquons tout de suite un groupe d’adolescents assis en tailleur sur le parquet marqueté. Par leur décontraction et l’activité de leurs mandibules, ces jeunes forment un contraste amusant avec les petits clans de mélomanes aux allures plus conventionnelles, occupés à siroter leurs flûtes de champagne en commentant les performances des artistes dont les accents résonnent encore à nos oreilles. J’observe un moment un garçon joufflu qui se gave littéralement de biscuits apéritifs, comme s’il devait reprendre des forces après une épreuve d’endurance. A ses côtés, ses camarades engloutissent sandwiches et canettes de sodas avidement extirpés de leurs sacs à dos. Un peu à l’écart, un trio de jeunes filles souriantes attire notre attention. Elles sont restées debout, manifestement moins affamées que leurs collègues et s’absorbent dans la contemplation du décor. Simone et moi échangeons un regard et d’un commun accord, nous les abordons. La spontanéité de leur réponse nous ravit :

— Ah oui on adore, c’est formidable comme on  sent cette femme submergée par la douleur !

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Comme ces collégiens venus de Saint Maximin la sainte Baume, nous sommes en effet à l’entracte d’une représentation de Lucia de Lammermoor, et venons d’assister au deuxième acte qui s’achève sur le mariage forcé de Lucia,   sous le charme du magnifique septuor vocal (qui a fait date dans l’histoire de l’art lyrique) où, en parallèle, l’héroïne exprime son désespoir irrémédiable; passage délicat et virtuose pour la soprano qui tient le rôle- titre. En franchissant le seuil du bâtiment, tout à l’heure, Simone a remarqué une affichette collée aux parois vitrées indiquant le remplacement de l'interprète initialement prévue. Ce soir, nous entendrons  Zuzana Markovà, dont la programmation ne comportait que deux dates. Nous voilà tapies sur nos étroits fauteuils du balcon, jambes calées contre les dossiers du rang précédent, mais curiosité aiguisée, et nous ouvrons largement nos yeux et nos oreilles au spectacle promis du chef d’œuvre de Donizetti.

À l’unisson de l’enthousiasme de notre jeune co-spectatrice, nous sommes bouleversées par l’interprétation qui vient de nous être offerte. Non que la mise en scène, correcte, ne soit inoubliable. Aux premiers accents fragiles du duo d’amour entre l’héroïne et son amoureux Edgardo, la voix de la « remplaçante » m’ avait semblé manquer d’ampleur. L’échange amoureux  me paraît transi, figé par une distance physique inadéquate entre les deux chanteurs. Sont-ils allergiques l’un à l’autre ? Pourtant, la voix de la jeune fille est claire, elle module aisément et son timbre prend peu à peu sa place, face à Guiseppe Gipali.

L’intrigue se met en place, l’infâme Enrico (Marc Barrard, baryton) défend honnêtement son rôle. Le chapelain Raimondo ( Wojtek Smilek) l’âme noire d’Enrico trame ses effets sur une voix de basse magnifique, qui appelle davantage à servir un Commandeur qu’un  vil traître, fût-il ecclésiastique. Bien que lauréat, la veille, du prix de la révélation artiste lyrique aux victoires de la musique classique,   le jeune ténor Stanislas de Barbeyrac ne dispose pas avec  le bref  rôle d’Arturo d’une partition qui permette de profiter de sa distinction. Néanmoins, malgré leurs talents et sans oublier le chœur de l’Opéra aux prestations toujours excellentes, la soirée restera illuminée par la démonstration de ZuzanaMarková. Sur le site forum opéra  dont l’adresse figure ici  

http://www.forumopera.com/index.php? act=News,cntnt01,detail,0&cntnt01articleid=6114&cntnt01returnid=54,

vous lirez l’article intégral de Maurice Salles, intitulée une étoile est née : »…prévue en seconde distribution, la soprano tchèque Zuzana Markovà se retrouve en première ligne. Est-elle galvanisée par les circonstances ? Peut-être. Mais même en l’admettant, car sa performance a été littéralement éblouissante, on se gardera d’oublier qu’il s’agit d’une prise de rôle et que la même a assuré la générale la veille en chantant à pleine voix. Or, que donne-t-elle à entendre et à voir ? D’emblée, et tout au long du spectacle, une Lucia qui ne cesse de sidérer par ce que l’interprète semble avoir compris et du rôle et d’elle-même. La voix est bien projetée, d’une homogénéité rare, avec un médium assuré et un registre grave consistant, et une extension vers le haut qui mène à des aigus brillants, fermes, et si longuement tenus qu’ils révèlent une gestion magistrale du souffle. Les piani sont délicats, les trilles précis et déliés, la justesse indiscutable, la grâce physique évidente et la sensibilité de la comédienne, dont la démarche frôle par instants la chorégraphie, donne à son jeu et à son chant une intensité suggestive. »

Que pourrai-je ajouter de plus ?  Ah si, allez lire l’article sus cité, vous verrez que mon enthousiasme paraît pâle comparé à la fougue de son auteur.

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Vous m’avez lu, souris discrètes et fidèles, et bien, écoutez maintenant !

 

      

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