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02/10/2011

Réflexions dominicales…


24°7 ou 25°4 ?
À quel thermomètre se fier avant de confier à l’onde fraîche mes pieds brûlants, mes mollets échauffés… Mon corps tout entier arraché à la torpeur siesteuse de ce dimanche quasi estival ?

Ne vous moquez point ! Je sais que vous jouissez aussi de la quiétude ensoleillée. Je n’ai donc aucune honte à vous confier mon dilemme. GéO, s’appuyant  quant à lui sur les certitudes du bon Dr Coué,   préconise de ne choisir en toutes circonstances que la vérité qui fait plaisir. Il opte pour le compteur optimiste quand j’ai tendance à échafauder une vérité relative tenant pour avérées et certaines les valeurs de l’un et les annonces de l’autre.
En vertu de quoi, j’ai évalué une bonne moyenne à 25° et me suis gourmandée: j’ai bravement lâché mon bouquin et me suis astreinte à quelques dizaines de longueurs. L’exercice est vivifiant, tonique confie GéO quand je le croise au milieu du bassin, et m’insuffle la force de remonter vous conter mes réflexions.


Car il m’arrive de réfléchir… Enfin, soyons honnête… de profiter des réflexions d’autrui.
À l’heure bénie du café, qui chez nous est souvent sieste-lecture, moment sacré de la mi-journée s’il en est, mes yeux ont accroché sur un meuble un petit livre rouge, aussi mince  d’apparence qu’il m’est précieux de contenu.

Rainer Maria Rilke, lettres à un jeune poète, écriture, création, Atelier d'écriture

Ce précieux recueil de conseils épistolaires ne s’adresse pas qu’au jeune poète en question*, et malgré l’empreinte du temps, il demeure un ouvrage d’une rare finesse, d’une sensibilité acérée, d’une  actualité percutante.
C’est à Ginette, compagne de l’ACL de Néoules, que je  voudrais dédier tout particulièrement les lignes relevées. Réfléchissant sur la définition de l’Acte créateur et de l’Écriture vendredi dernier, Ginette a exprimé entre autres sentiments, le déclic de la solitude comme pulsion d’écriture. Et puis, comme souvent, Ginette demande l’expertise, l’aval de Christophe, elle clame son besoin d’encouragement. Et j’ai trouvé dans la toute première lettre ces phrases qui traduisent, me semble-t-il, les réserves qu’émet notre animateur à décerner à nos travaux une échelle de valeur.

 D’ailleurs, pour saisir une œuvre d’art, rien n’est pire que les mots de la critique.Ils n’aboutissent qu’à des malentendus plus ou moins heureux.
(…)
  Personne ne peut vous apporter conseil ou aide, personne. Il n’est qu’un seul chemin. Entrez en vous-même, cherchez le besoin qui vous fait écrire : examinez s’il pousse ses racines au plus profond de votre cœur.… Demandez-vous à l’heure la plus silencieuse de votre nuit : « Suis-je vraiment contraint d’écrire ? » Creusez en vous-même vers la plus profonde réponse. Si cette réponse est affirmative, si vous pouvez faire front à une aussi grave question par un fort et simple « je dois », alors construisez votre vie selon cette nécessité.
(…)
Vous n’essaierez pas d’intéresser des revues à vos travaux, car vous en  jouirez comme d’une possession naturelle, qui vous sera chère, comme d’un de vos modes de vie et d’expression. Une œuvre d’art est bonne quand elle est née d’une nécessité. C’est la nature de son origine qui la juge.

( Extrait de la lettre du 17 février 1903)

 

Tout comme Ginette, il m’arrive parfois de ressentir une solitude de coureur de fond quand je confie à ces pages l’une de mes conte-gouttes, sans percevoir l’intérêt d’éventuel lecteur. Un petit pincement de joie me ragaillardit quand je constate que certains textes, bien qu’anciens, sont ouverts au gré du zapping des souris de passage. Les mots de Rainer Maria Rilke m’ont mis du baume au cœur et confortent cette assurance nouvelle qui est mienne. Décidément, les réflexions dominicales ont du bon.

 
* Il s’agit de Franz Xaver Kappus, alors élève  cadet dans une école militaire autrichienne, et devenu plus tard romancier. On a oublié aujourd’hui ses œuvres, mais on lui doit la publication de dix lettres qu’il a reçues du poète déjà reconnu. Que son nom passe à la postérité pour ce geste, il a permis à nombre d’entre nous d’y puiser de très intéressants réconforts. 

Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète, édité dans la collection cahiers rouges de chez Grasset. 

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