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23/03/2010

Rossini à Marseille

Ce vendredi de la mi-mars, soirée « filles » en compagnie de  Simone… La programmation choisie pour la circonstance promet d’être brillante, puisque l’Opéra de Marseille présente une œuvre très peu connue de Gioacchino Rossini : le Voyage à Reims, ou si  l’on préfère en VO :  Il Viaggio a Reims o sia L’Albergo del Giglio d’oro.

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L’Opéra de Marseille se situe derrière le vieux port, en symétrie de la Bourse par  rapport à la Canebière. La perspective  de la rue de Beauvau qui débouche sur l’esplanade Ernest Rayer offre un cadre serré au  péristyle qui constitue le dernier vestige du bâtiment initial. Érigé peu avant la Révolution française,  inauguré le 31 octobre 1787,  l’œuvre de l’architecte Joachim Bénard, a brûlé presque entièrement le  13 novembre 1919. Au cours d’une répétition de l’Africaine, de Giacomo Meyerbeer, l’incendie se propagea si rapidement que la quasi-totalité du bâtiment fut détruite. Seules, la colonnade du péristyle  à l’extérieur, la majorité des murs-maitre et, fait exceptionnel, la frise d’Antoine Bourdelle qui encadre la scène ont résisté aux flammes.
Les travaux de restauration ont nécessité trois années,   et c’est  Gaston Castel qui signe cette reconstruction. L’inauguration a lieu le 3 décembre 1924, et Marseille s’enorgueillit d’être la seconde ville de province, après Bordeaux, bénéficiant d’un Opéra. Toutefois, la gestion de ce lieu prestigieux ne revient à la municipalité qu’après la seconde guerre mondiale.

C’est donc dans un théâtre à l’italienne, chaleureux et d’une bonne qualité auditive que nous avons assisté au Voyage à Reims. Œuvre curieuse en vérité, ni Opéra ni oratorio, le sujet de ce voyage obéit aux règles d’une œuvre de commande.

« Plus que la quintessence de l’opéra rossinien, Le Voyage à Reims en est une excroissance caricaturale. Tout pour le chant, rien pour la dramaturgie: tel est ce tribut payé à la gloire du bel canto. Avec quatorze premiers rôles et seulement quatre seconds, il représente un casse-tête pour les directeurs artistiques, doublé d’un gouffre pour les argentiers. » Telle est la définition qu’en livre en 2002 Stéphane Villemin à propos de la création de l’œuvre à Toronto.( http://www.scena.org/nav/send.asp?id=17012&lan=1)


Le livret de Luigi Balocchi, inspiré de la Corinne de Germaine de Staël, a été confié au jeune Rossini pour exalter la Restauration. L’œuvre est créée à Paris, au Théâtre Italien le 19 juin 1825.  L’argument en est très mince, dénué de toute dramaturgie, ce qui permet de comparer l’œuvre à  « un opéra cabaret d’actualité », ce qui définit assez bien  la revue constituée par ce spectacle :
Dans le décor d’un hôtel de Plombières, luxueuse station thermale en vogue en ce début de XIXème siècle, les habitués se réjouissent de l’opportunité de rejoindre Reims où doit avoir  lieu le sacre de Charles X, le roi de la Restauration de la monarchie française. Cette petite société très cosmopolite est constituée de Coquettes et de leurs prétendants, guère plus sérieux que leurs belles. L’art de Rossini tient tout entier dans la succession d’airs remarquables qui permettent à chacun des rôles d’exprimer l’essence de l'Art Lyrique. Je n’entrerai pas dans les subtilités des scènes de séduction et de jalousie qui se répondent avec le charme de la musique, vous aurez compris que c’est d’un intérêt limité. En revanche, nous avons été charmées toutes deux par la mise en scène délurée, un tantinet insolente qui souligne le côté superficiel de l’argument en lui conférant un ton déjanté, proche de l’humour de notre époque.
Les costumes évoquant plutôt les années folles, le décalage créé établit une distance suffisante pour que le zèle flatteur de l’œuvre initiale se délite dans la comédie ambiante.
Le soir où nous avons assisté à la représentation, les rôles principaux étaient tenus par Hye Myung Kang , remarquable dans le rôle de la poétesse Corinna, à mon sens la plus belle partition, Elizabeth Bailey incarnant la comtesse de Folleville, ainsi qu’Oxana Shilova en Madame Cortese. Quant à Kleopatra Papatheologou, elle nous a ravies dans le rôle de La Marchesa Meliba, ce rôle de soprano profond était magnifiquement tenu par la tessiture pleine et riche de cette jeune chanteuse. Dans l’ensemble une distribution sans faute, même si je ne m’attarde pas sur les rôles masculins, la soirée n’a souffert d’aucune faiblesse, et le public a littéralement ovationné l’ensemble de la troupe. Ce qui me paraît très encourageant pour les jeunes chanteurs qui embrassent une carrière ardue, où le chemin de la reconnaissance est particulièrement âpre, alors que le travail de la voix  est exigeant et l’accès aux distributions   un parcours du combattant incessant. Pour cette tournée, c’est le CFPL (centre français de promotion lyrique) qui essaie de mettre en place une filière de reconnaissance et de distribution, afin de faciliter la construction de carrière à de jeunes chanteurs. La ville de Marseille organise également un concours afin de promouvoir les talents en éveil…
Aux Bordelais maintenant  de profiter en cette fin mars de ce  savoureux programme.

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Aux amateurs éclairés qui souhaiteraient approfondir l'analyse de l'oeuvre, je recommande le lien suivant: