Les Colombes de l'Amitié (15/03/2010)
Petit retour attendri sur le groupe d’où est née la note précédente : L’Amitié n’est pas un don qui tombe du ciel comme une pluie printanière, encore que… Comme tous les sentiments, elle a besoin qu’un ensemble de paramètres soient réunis, que les échanges soient réciproques et l’intérêt mutuel…
Or il se trouve que la dernière école où j’ai pratiqué possède cette singularité étrange :
Aussi loin que remonte la mémoire des plus anciennes, le groupe des « instits » a toujours constitué une unité amicale, conviviale, joyeuse, animée d’une volonté de réussite collective.
Grâce soit rendue à cette page de ma vie. Mon arrivée dans notre petite école au cours des années 90, chargée d’un bagage familial plutôt pesant, mais motivée par une furieuse envie de m’y caler pour construire quelque chose de différent. Quoi, je l’ignorais, je savais juste ce dont je ne voulais plus. Dès le mois de juin précédent mon ralliement à la cause Sainte Colombe, l’accueil de l’équipe en poste s’est révélé extraordinairement chaleureux. Premier contact aux cafés croissants rituels du samedi matin, alors encore en vigueur, puis à la session de formation continue, à Nogent, où les conversations en délire avec Anne-Marie ont renforcé mon enthousiasme…
Est-ce dû à l’école, à l’histoire spécifique de ce petit îlot autonome dans une petite ville qui navigue entre campagne et grande banlieue ? Toujours est-il que de mémoire « d’instits », cette franche solidarité y a toujours régné. J’apprends avec bonheur que l’entente des « nouvelles » semble largement aussi patente. … Neuf ans après mon départ, le rappel des Colombines lors de nos retours est toujours aussi vivace, le rassemblement rayonnant du bonheur de passer quelques heures ensemble.
2010
Anita l’a défini très justement : Sainte Colombe nous unit par la Bienveillance qui éclaire les regards. Bienveillance constatée comme il se doit à l’égard des enfants qui nous sont confiés, et comme il faut bien s’aimer soi-même pour aimer autrui, Bienveillance fondatrice de l’esprit d’équipe. Les Colombines cultivent le don de l’Amitié, elles acceptent l’Autre comme elle est, et la somme de toutes les différences crée une harmonie spontanée où chaque personnalité s’épanouit sans fard et sans retenue : l’humour distancié d’Éliane, la fraîcheur d’Anita, la fantaisie d’Anne-Marie, les éclats de rire de la blonde Sylvie, la patience de Laurence, la discrète vigilance d’Alice, la pétulance de Brigitte… Tout cela mixés parfois aux accents décontractés d’Éric, le surveillant général, plutôt en charge du collège, mais toujours disponible pour nous dépanner. Et puis, ce rite bien particulier qui n’appartient qu’à notre brune Sylvie : chaque matin, elle se tient dans la cour, à l’endroit où les rangs sont en cours de formation…Naturellement, elle n’est jamais seule, parents, élèves ou collègues l’entourent déjà. À la manière d’un chef d’orchestre qui maîtrise à merveille sa partition, elle suspend la conversation en cours afin d’adresser un Bonjour particulier et quasi solennel à chaque nouvelle arrivante. Elle seule sait instiller dans ce seul mot, Bonjour, un message inscrit en filigrane qui se personnalise dès qu’il est propulsé dans l’air, et se charge instantanément d’informations précises et pertinentes. Ce bonjour ferme et courtois sonne comme: « Je te souhaite une bonne journée ! – Où en es-tu ? -As-tu bien dormi ? - Ta soirée d’hier a-t-elle été bonne ? - Tes soucis avec tes enfants sont-ils gérables ? - Comment te portes-tu, Toi ? »
On n’échappe pas à la vigilance d’une telle amie : alors, si d'aventure, votre fiston de 16 ans est ressorti pendant la nuit et que vous l’avez attendu avec angoisse, si les factures arrivées au courrier de la veille vous donne des sueurs froides, si la voiture menace ruine et que la voisine renverse les poubelles dans la rue, si vous sortez de votre nuit chiffonnée par un mauvais sommeil, vous confessez le tout dans le minuscule espace-temps de ce bonjour devant les rangs à demi formés.
Un échange de regards, un bonjour attentif, un sourire bienveillant, la plus faible d’entre nous sait qu’au premier moment libre, elle trouvera dans la présence des autres le réconfort nécessaire…
Combien de café-récré ont donné lieu à de petits complots bienveillants pour venir en aide à telle ou telle que menaçait une détresse passagère ou un souci profond ?
Face à cette cohésion, nombreux sont les parents qui s’en félicitent, certains que les enfants bénéficient de cette entente jamais rivale, si volontiers complémentaire. Et si là comme ailleurs le monde n’est pas parfait, les solutions-miracle pas plus inspirées par les mânes de notre sainte patronne que par le saint-esprit, au moins puis-je assurer sans mentir que chaque enfant confié y a trouvé sa place le regard bienveillant de nos Colombes de l’amitié.
19:25 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : écriture, récit, souvenirs, journal | | del.icio.us | Facebook | | Imprimer
Commentaires
Tout ceci est tellement vrai..
Colombine de deuxième génération, je partage ces sentiments encore aujourd'hui!
Écrit par : céline | 24/03/2010
merci Céline, et ta présence atteste la pérennité et la transversalité de cette amitié, non?
Écrit par : Odile | 25/03/2010