Accueil en chambres… (19/07/2009)

Nos petites escapades de Juin ont été l'occasion d'expérimenter l'hébergement en chambres d'hôtes.

Cette nouvelle formule d'hôtellerie rencontre un succès réel, l'accueil y est généralement plus chaleureux et personnalisé que dans les hôtels abordables par nos bourses, et les rencontres qu'on peut y faire sont  autant de portes ouvertes à l'imprévu...

Ce fut le cas à La clé des songes, à Courpalay ( seine et marne), où l'accueil de Clément Saadia nous a ravis. Dans sa demeure  de charme, installée dans un ancien corps de ferme, le couple a aménagé quelques chambres aux noms fleuris, dont les fenêtres donnent sur un immense jardin, prolongé par un parc arboré. À soixante-dix kilomètres de Paris, entre Disneyland et Provins, l'attrait de cette halte réside dans le calme et le confort  d'un agencement élégant, tirant parti des vieilles pierres, de l'espace des hauts murs, de la décoration mêlant sobriété et tradition. Dans la cuisine jouxtant la salle où sont servis les petits-déjeuners, le visiteur curieux peut jeter un œil sur les nombreux livres de cuisine qui allèchent les gourmands. Le site respire et inspire les moments douillets et conviviaux, confitures- maison et lecture au coin du feu... Car dans la décoration des lieux ont été inclus les livres qui ont réjoui les hôtes de la maisonnée, petits détails qui invitent au partage.
Notre hôte officiant justement comme premier magistrat de la commune au mariage d'Olivia et Nicolas, il n'en a pas fallu davantage pour que la conversation se noue. Et que croyez-vous qu'il en est  ressorti ? Donnant-donnant, nous avons goûté les spécialités de la maison, il est convenu que je prépare les foies gras pour leur prochain passage dans notre région, en août sans doute...

La clé des songes
7 à 8 cour Durand
Le Grand Bréau
77540 Courpalay
http://www.lacledessonges.com

Nos découvertes précieuses ne se limitent pas à la Seine et Marne.
Notre petite évasion en Normandie a donné lieu à d'autres aventures, d'un aloi fort différent.
Gardons pour la bonne bouche les retrouvailles de GéO et de sa bonne amie d'antan, l'épisode mérite une note particulière. Restons plutôt dans notre catalogue d'appréciation de la qualité d'accueil en chambres d'hôtes et les pratiques des uns contrecarrant les us des autres, comme vous pourrez en juger.

Retour sur nos  destinations respectives : GéO préparant notre passage à Port en Bessin, je me suis mise en quête d'un gîte à Saint Pair sur Mer, dans la baie du Mont Saint Michel, haut lieu de mes vacances enfantines! Un écart de près de cinq décennies a effacé mes repères, mieux vaut me fier à la publication des adresses  sur le site de l'office du tourisme à Saint Pair sur mer. Après un tour d'horizon complet, j'arrête mon choix sur la foi de la description présentée sur le site  http://www.normandie-chambreshotes.com/


La page d'accueil y est très claire, intitulée  informations pratiques, sous titrée Saint Pair sur Mer, illustrée d' une photo  lumineuse de coucher de soleil, suivie de quelques lignes  de texte situant la localité. Puis la présentation des chambres se résume à trois photos, baptisée poétiquement chambre 1, chambres 2 et 3.
Reprise du texte concernant la situation géographique, précisant que la maison est à 250 m de la plage, que la vue sur mer des chambres est imprenable, s'ensuivent les coordonnées téléphoniques et l'adresse de la maison.
En cliquant sur la note « plan d'accès », on peut trouver alors deux cartes graphiques, l'une situe Saint Pair par rapport à la presqu'île du Cotentin, la seconde consiste en un plan d'accès du Chemin Lang. 
Voilà qui paraît assez tentant.  J'imprime derechef  toutes les pages du site afin de les présenter à mon cher et tendre époux,  certaine de la qualité de mon exploration et des correspondances avec mes critères de choix, pour l'internaute , disons, amateur- éclairée que je me flatte d'être. Si, si, pas de sourire en coin, mon jeune neveu Hervé m'a même  flattée à propos de mon habileté remarquable et remarquée à saisir des données sur mon téléphone tactile ! « À presque 60 balais », il paraît que c'est impressionnant pour ce jeune homme de 22 ans, né donc à l'ère informatique !!!.
Pardonnez la longue description détaillée du site, vous allez comprendre que le suivi des opérations n'est pas si anodin.

Je finalise donc ma réservation par téléphone. Dans un premier temps, l'homme répond à ma demande en proposant deux chambres attenantes, « communicantes si on veut », mais parfaitement indépendantes, pour un prix forfaitaire de 80 €, petits-déjeuners en sus. Nous sommes hors saison, cela me paraît raisonnable, mais j'insiste sur le fait que les chambres  doivent être indépendantes, ce que mon interlocuteur confirme. Il n'omet pas de me demander la moitié de la somme à titre d'arrhes. J'obtempère par courrier, prenant la précaution de rappeler dans ma missive que ma réservation est destinée à un couple et un adulte, donc que nos chambres doivent être indépendantes. Le brave homme, un peu hésitant, me rappelle dans la soirée pour préciser qu'il nous attend bien pour la nuit du 23 juin mais qu'il serait souhaitable que nous quittions nos chambres  avant 9h30 le lendemain, ce à quoi je ne vois pas d'inconvénient. Toutefois, au cours de cette conversation,  je propose, si notre passage pose problème, de trouver un autre hébergement, mon chèque d'arrhes n'étant pas encore posté.
- Oh non, se récrie-t-il, dans la mesure où vous aurez quitté les chambres avant dix heures, nous n'avons pas de souci.

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Quand nous arrivons enfin à Saint Pair, le mardi après-midi, l'homme m'avait rappelé en route pour s'assurer que nous n'avions pas changé d'itinéraire. Mon chèque d'arrhes ayant été encaissé, cette inquiétude nous a amusés. En fait, l'adresse s'est avérée difficile à trouver. Le Chemin Lang est devenue  une rue  bordée de  villas cossues qui n'existaient pas dans mon souvenir. Elle se situe au sud de la localité, au niveau des rochers de Saint Gaud, seule partie rocheuse sur la longue plage qui borde Saint Pair. Le problème est qu'en descendant le chemin, puis en le remontant, nous n'arrivons pas à situer la maison où nous nous savons attendus. Mieux, toutes les villas portent  soit un numéro soit  un de ces petits noms  porte bonheur, genre « Abri côtier » comme  dans mon souvenir attendri, mais pas de n° 335 en vue ! Au 3ème passage, enfin, je me décide à aborder une femme en train de bricoler dans sa courette.
- Mais c'est ici, vous y êtes ! me répond-t-elle, en agitant son pinceau couvert de peinture blanche à fleur de mon nez.

Le temps de garer la voiture, notre bricoleuse est prête à nous guider dans les lieux. Une petite porte sur le côté de la façade permet  un accès indépendant  à l'étage, grâce à un escalier aux marches ripolinées immaculées; au bout du couloir prolongeant  les derniers degrés, nous accédons sur la droite à une porte qui ouvre sur la première chambre. Dans une harmonie décorative identique à la cage d'escalier, tout est blanc. Les murs, le sol, les meubles, les rideaux, le garde-fou du balcon perceptible à travers la double porte-fenêtre. Au royaume immaculé... Sur le mur de gauche, une porte et un saut de deux petites marches desservent en contrebas la salle de bain, assez vaste, baignoire, pour ameublement, malle et casiers en  osier peints en ...blanc. L'ensemble est très coquet, un peu english kitsch, parfaitement adapté à l'ambiance côte normande, qui conserve  encore, entre nous soit dit, certain  caractère  d' ancienne colonie victorienne...
Je félicite la personne pour l'harmonie des lieux, puis  nous nous enquerrons de la seconde chambre, et le tableau idyllique se gâte...
- Elle est là, désigne  sobrement la propriétaire des lieux en désignant de la main une pièce située sur la gauche.

Nous entrons dans la chambre et découvrons bien sûr un aménagement identique.  Toutefois, une remarque s'impose immédiatement : cette pièce ne dispose que d'un accès, la première chambre ! Le défaut saute aux yeux et Marie- Geneviève murmure à mon oreille :
- Mais je ne vais quand même pas m'installer là, si je dois me lever cette nuit, je n'ai pas envie de vous déranger !

Avisée de notre désaccord, l'hôtesse proteste mollement et consent  à préparer la troisième chambre, qui se trouve au bout du couloir, contigüe aux deux autres. Elle dispose d'une salle de bain privée ... en rez de chaussée. Rien d'idéal comme confort, certes, mais moins ennuyeux que de partager l'espace d'une suite, avec une seule entrée.
Comme nous nous apprêtons à descendre enfin sur l'estran qui se dégage à vue d'œil, le mari de notre hôtesse toque à la porte de la chambre où nous nous changeons. Il m'aborde de front, apparemment très agacé :
- Cette chambre, vous l'avez bien vue sur internet, non ?
- Évidemment, nous en avons discuté...

- Alors, vous avez bien vu comment c'était disposé, y'a rien à en redire.
Et sans me laisser le temps de rétorquer quoi que ce soit, il enchaîne :
- La chambre que vous avez demandée à ma femme, c'est plus cher !
Au ton utilisé, je ressens une réelle contrariété et je me dis in petto que la dame doit être souffrante, ou qu'il y a un souci majeur dans cette demeure... Mais nous sommes tous les trois d'avis que Marie- Geneviève n'étant ni notre enfant ni notre chaperon, elle a bien mérité autant que nous l'intimité à part entière  d'une chambre indépendante.

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La balade sur l'estran, « le-sable-mouillé » de mon enfance ,  est agréable,  la visite de Granville et le dîner à l'Astérie sur le port nous apportent la détente attendue, nous sommes ravis du spectacle de la côte quand  nous réintégrons nos chambres.  Mais une nouvelle surprise nous attend : l'indispensable halte aux toilettes cache encore un piège dans cette maison au confort décidément particulier : le petit coin  l'est vraiment, petit, et  caché presque en haut de l'escalier, peu après le tournant qui débouche sur le couloir. La porte s'ouvre sur la largeur de trois degrés et le bouton d'électricité  est caché à l'intérieur des toilettes. On devine que nos visites nocturnes, bien naturelles, seront casse-cou. Il y a fort à craindre, dans la contrée, pour  la santé des cols de fémur et autres fractures du tibia ! Encore heureux si la digestion des fruits de mer se déroule sans effets déliquescents ! Inutile de préciser que l'endroit est en partage pour  les six usagers potentiels des trois chambres, en admettant que la maison fasse le plein! 
Comme nous sommes de vrais petits veinards, la nuit se déroule sans drame, si ce n'est ce matelas cotonneux qui me garantit une houle incertaine à chaque retournement de GéO. Bonne nature tout de même,  nous jouissons du petit déjeuner sur le balcon-avec-vue-sur-mer.   En bouclant les bagages, il me revient  alors que j'avais conservé le dossier imprimé de mes recherches et GéO en parcourt les feuillets : effectivement, rien ne prête à penser que les lieux sont intriqués de la sorte.

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Nous descendons régler la note, qu 'après tout nous avons résolu de ne pas contester, quoique... Dans la minuscule entrée  qui dessert  l'escalier et la salle de bain de la chambre 1,  la note nous attend, posée dans un cendrier sur une table. Comme GéO commence à rédiger le chèque, j'entreprends de faire remarquer courtoisement à notre hôtesse l'inadaptation des lieux, l'état du matelas et en particulier  l'accès acrobatique aux  WC. À peine ai-je achevé ma première phrase, pourtant enrobée de précautions oratoires, que la dame monte sur ses grands chevaux :
- Mais pourquoi vous m'agressez comme ça, lance-t-elle sur un ton tragique, sa voix rauque hérissée d'effets suraigus.
- Madame, je ne vous agresse pas, j'use de mon droit de client pour signaler...
- Si, vous m'agressez, d'abord !
Et voilà les sanglots longs, les trémolos tragiques, la trace humide de larmes montantes  comme la marée, qui éclairent son regard de biche traquée...
Ah, je suis cool, ce petit voyage aux sources me réjouit, je n'ai vraiment pas l'humeur atrabilaire, mais la réponse héroïco-scénique de ma Sarah Bernard Normande m'agace un poil, je l'avoue, d'autant que j'entends ma discrète belle-soeur commenter  derrière moi :
- Ah ben non, tu n'es pas agressive, tu t'exprimes, c'est pas pareil.
Là-dessus  GéO, qui achevait de rédiger le chèque global sans interférer dans notre propos,  notre GéO donc, lâche son stylo et intervient de sa voix si mélodieuse,  si douce et  apaisante que connaissent  bien tous ceux qui le pratiquent :
- On vous agresse pas, on vous dit quand même que les lieux ne correspondent pas à la description qu'on a vu sur votre site.
- Ah mais si ! bondit l'aubergiste, toute requinquée, voyez-vous même...
Elle pousse derechef la porte de communication avec son logement, où nous découvrons le coin ordinateur,  écran allumé connecté justement sur le site,  à la page description des chambres... 
GéO a l'esprit vif. Il vient en outre de relire les pages du dossier que j'avais imprimées, le double de la lettre de confirmation. En un quart de tour, il s'aperçoit qu'effectivement de subtiles différences  modifient l'aspect du site.  GéO peut être coulant, mais il a une Sainte Horreur d'avoir le sentiment qu'on cherche à le rouler... Là, la pauvre dame a tout faux, pour le coup.
- Mais vous l'avez modifié votre site, depuis la visite de ma femme...
- Mais non, monsieur, regardez, il a toujours été comme ça ! D'ailleurs, c'est pas moi qui l'ai fait, j'y connais rien en informatique...

- Mais si, il est modifié, vous allez voir, nous allons comparer avec le dossier qu'a imprimé mon épouse. Odile, t'as le dossier ?
Comme je tends les pages à consulter, elle les repousse d'un coup, sans y jeter le moindre regard, avant de recommencer l'antienne matinale :
- Et puis d'abord, vous m'agressez ...
Avouons que l'organe vocal de GéO peut sonner un peu rogue, surtout dans ces circonstances, mais ce n'est rien encore par rapport à ce qu'il peut donner quand on titille sa patience plus que de raison. L'innocente croit l'avoir au sentiment, et redouble  ses trémolos languissants, mais en face, GéO triomphe par la puissance du rugissement.
Il commence par reprendre le dossier, et le lit à voix haute, date et précision de bas de page incluses.
- Là en date du 2 juin, page 1 sur 2 , puis page 2 sur 2.  Vous sur le site, vous nous montrez trois pages maintenant...
- Mais c'est votre femme qui n'a pas cliqué sur les photos...
- Ah oui, vous n'y connaissez rien, mais vous savez que ma femme n'a pas cliqué où il faut ! Et la photo de la page d'accueil qui n'est plus la même, c'est ma femme peut-être ?
- Mais oui, elle a dû modifier, je sais pas moi, et puis vous m'attaquez chez moi, c'est pas juste.
- D'abord je ne vous attaque pas, je remarque que vous avez modifié des informations et ça s'appelle de la mauvaise foi...
Le ton continue de grimper vers les sommets himalayens du désaccord, quand, au mot « mauvaise foi » lâché par l'ire de GéO, notre hôtelière s'effondre de plus belle, arguant de sa faiblesse féminine et de son innocence. C'est bien plus qu'il n'en faut , GéO rompt d'un coup l'escarmouche d'un superbe :
- Et faites pas votre Ségolène, à pleurnicher quand vous êtes prise en défaut !

Une chose est sûre, pour cette fois, nous ne nous sommes pas fait d'amis à Saint Pair sur mer !

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18:47 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : récit, écriture, voyage, chambres d'hôtes | |  del.icio.us |  Facebook | |  Imprimer